Lorsque le mur de Berlin est tombé, j’avais quinze ans. Je me souviens du désir que j’avais de partir par le train de nuit pour rejoindre la ville, à l’Est, petite enclave où le vent de l’Histoire semblait, une nouvelle fois, avoir soufflé. Berlin ouverte, Berlin inséparée. Les choses alors se présentaient à mon esprit de la façon suivante : il y avait le réel d’un monde obscène, sans élan, des sociétés de l’Ouest qui célébraient par le crédit l’accès à la marchandise, la réalité sans cesse déçue du marché, de la croissance. Et il y avait là-bas, à Berlin, une espèce de vibration que je découvrais alors et que je pressentais être le point de commencement d’une nouvelle histoire. Dans les années qui suivirent, je compris vite, au contraire, la part d’effondrement, de tristesse, qui accompagnait l’événement de la chute. Le mur de Berlin, en tombant, avait engendré une mélancolie singulière, celle d’une dépossession. Ce n’était plus les hommes, apprenait-on, qui écriraient l’histoire, mais un agencement de procédures, de règlements. L’Europe se flattait d’avoir accédé à l’&a

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