Il n’y a pas d’utopie innocente
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En matière d’utopie, la réalité ne dépasse pas la fiction, elle la confirme en démontrant dans les faits que « qui veut faire l’ange, fait la bête », et qu’en prétendant construire ici-bas le paradis terrestre, on finit à coup sûr par y instaurer l’enfer.
Le point de départ semblait pourtant plein de jolies promesses, celles que le lecteur émerveillé découvre en parcourant Utopia (L’Utopie), le texte fondateur, publié en 1516 par l’humaniste anglais Thomas More. Il y est question d’une cité idéale où tous les habitants vivent heureux et vertueux dans l’égalité et conformément à la raison. Une république parfaite, mais qui n’existe pas – d’où son titre, u-topia, le « lieu qui n’est nulle part en grec » – ; ou du moins, pas encore, même si rien n’interdit d’espérer, comme le laissent entendre les derniers mots du livre. Sans doute cette ouverture explique-t-elle d’ailleurs pour partie l’immense postérité, d’abord littéraire, puis programmatique, politique et concrète, de ce texte capital.
Pourtant, très vite, le lecteur, revenu de son attendrissement initial, perçoit quelque chose comme une ambiguïté, un malaise : ce que la critique universitaire contemporaine a pu qualifier de « tendance autodestructrice du paradigme utopique ». S
« L’utopie, il faut y croire pour qu’elle advienne »
Rutger Bregman
Nous fêtons le cinquantième anniversaire de Mai 68, dont vous citez dans votre ouvrage l’un des slogans : « Soyez réalistes, demandez l’impossible ! » Est-ce le dernier moment de notre histoire récente à avoir fait la part belle à l’utopie ?
Non, je ne pense pas. On a pu …
[Éden]
Robert Solé
Je vivais dans un monde paisible et rassurant. Un monde sans inondations ni sécheresses, sans accidents nucléaires, aériens ou ferroviaires, et sans la moindre collision sur les routes.
Des rêves à portée de main
Aude Lancelin
Alors qu’on célèbre sans conviction les cinquante ans de Mai 68, on finirait presque par oublier que ce qui fit toute la spécificité des « événements », c’était l’autorisation à rêver. L&rsq…