Prémices d’une catastrophe

M. Derché (XIXe siècle)

Dans la nuit du 13 au 14 août 1822, un séisme secoue la ville. En un instant, son opulence s’écroule. M. Derché, alors interprète au consulat de France à Alep, témoigne de la catastrophe.

Depuis quelques jours le ciel était embrasé ; une atmosphère épaisse enveloppait la ville et la couvrait comme d’un voile ; le thermomètre restait invariablement fixé à 32 degrés ; et la nuit, loin d’apporter quelque soulagement aux peines du jour, venait les redoubler en y mêlant ses craintes et ses horreurs. Déjà même quelques secousses avaient eu lieu ; et quoi qu’il se passât rarement une année sans qu’elles se renouvelassent, cependant les circonstances qui accompagnaient celles que l’on ressentait, donnaient de vives inquiétudes. Enfin, le 13 août, vers les 8 heures du soir, un bruit souterrain se fait entendre, et il est immédiatement suivi d’une secousse qui répand l’alarme dans la ville.

Alors, mais trop tard, les personnes que de tristes pressentiments agitaient et que la crainte seule de passer pour pusillanimes avait fait rentrer dans l’enceinte des murs, virent la mort inévitable se présenter à elles. La fuite était impossible ; toutes les portes de la ville, celles des khans et des bazars étaient fermées ; et la frayeur avait glacé les esprits au point que, cédant à ses impressions, les hommes les plus intrépides attendaient dans la stupeur, et sans penser à le détourner, le coup dont ils étaient menacés.

Ce coup ne se fit pas longtemps attendre : vers les 8 heures et demie, on entend redoubler le bruit souterrain, précurseur de toutes les secousses violentes que nous avons ressenties ; chacun s’écrie : nous sommes perdus 

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