Le roman, comme toute forme de littérature, est l’élaboration intime d’un au-delà possible. C’est d’ailleurs le seul au-delà humain et plaisant qui soit à portée de main et de déchiffrement. Jugez-en, l’au-delà religieux est toujours ainsi défini : il est la possibilité de survie du corps selon les religions, « l’après » de la résurrection et du jugement, la formulation de l’éternité. Sauf que dans cette version monstrueuse, il exige la mort, la disparition, la dépossession absolue par le trépas. C’est un peu hasardeux et il y faut de la foi ou du pari. Ce qui n’est pas le cas de la littérature : c’est l’au-delà de l’homme, par l’homme, mais sans la mort. Il suffit de fermer le livre pour revenir à soi, aux siens, s’assurer la résurrection par le décrochement. Interrompre la lecture pour restaurer le corps du lecteur et sa frontière. L’au-delà est donc une vieille histoire : on l’a commencé par la religion, il se perpétue par la métaphore, le roman, le livre, la lecture, la littérature, l’art. Du coup, le roman est le seul moyen d’aller au-delà du corps, sans en mourir, et revenir sans être un revenant. C’est le grand miracle des livres et œuvres, leur puissance : nous offrir l’éternité sans nous tuer, ni exiger notre mort, ni nos supplications. La seule ascèse y est le silence. On accède alors &agra

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