La tomate n’est pas un produit historiquement consommé dans le bassin méditerranéen, comme on se le représente souvent, car son introduction en Europe depuis les Amériques date du xvie siècle. Les représentations que nous avons de la « diète méditerranéenne » remontent, elles, aux années 1950-1960. C’est ce qu’on y mangeait alors qui a été considéré comme l’alimentation typiquement méditerranéenne.

Ce fruit est très riche en caroténoïdes – une famille de composés chimiques, dont le plus connu est le bêta-carotène, qui donne sa couleur à la carotte –, et particulièrement en lycopène. C’est à ce dernier que la tomate doit sa couleur rouge et, très probablement, plusieurs de ses effets positifs sur la santé. De fait, il a été démontré que cette molécule présente des effets antioxydants et anti-inflammatoires importants, notamment dans le domaine cardio-métabolique. Ceux-ci pourraient se révéler protecteurs pour les personnes en situation d’obésité ou de diabète de type 2. La tomate contient également des vitamines, des molécules organiques appelées les polyphénols, qui ont également des effets anti-inflammatoires et antioxydants. Tous ces micronutriments ont potentiellement un rôle à jouer dans la prévention de certaines pathologies.

Il y a quelques années, nous avons travaillé, avec mon équipe de l’Inrae, sur les effets sur des souris de la poudre de tomate – un ingrédient utilisé en grande quantité dans des préparations comme colorant ou exhausteur de goût. Nous avons ainsi pu démontrer qu’elle permet de limiter la prise de masse et de maintenir l’homéostasie glucidique – donc, de contenir le risque de diabète pour les animaux. Ces vertus tiennent en grande partie aux anti-inflammatoires contenus dans le fruit.

Ces premiers travaux avaient été réalisés avec une poudre de tomate commerciale. Dans leur continuité, je m’efforce à présent d’optimiser cette poudre en jouant sur le choix des génotypes du fruit. Sous l’appellation très générique de « tomate », plus de 2 000 variétés sont identifiées, avec des profils en nutriments très variables.

Il semble donc que le déficit hydrique ne modifie pas l’impact des fruits sur la santé.

Au-delà de ces considérations génétiques, nous nous sommes aussi intéressés aux conditions de culture de la tomate, et particulièrement à la question du stress hydrique. Avec le dérèglement climatique, nous sommes confrontés à une crise de l’eau qui ne peut aller qu’en s’aggravant. Nous nous sommes donc demandé quel serait l’impact de la limitation de l’irrigation des champs sur la qualité des fruits. Mes collègues d’Avignon ont alors défini un niveau d’irrigation optimal par rapport aux propriétés physico-chimiques de la terre et, sur cette base, ont réduit l’irrigation environ de moitié. Ce travail a permis de démontrer que, si le déficit hydrique affectait fortement le rendement (nous produisons moins de tomates sur une surface donnée), la teneur en micronutriments était certes quelque peu diminuée, mais sans que ces variations soient très notables. Ces fruits ayant été donnés à des animaux, nous n’avons pas constaté de différences importantes avec les résultats observés lorsqu’on les nourrit de tomates irriguées à 100 %. Il semble donc que le déficit hydrique ne modifie pas l’impact des fruits sur la santé.

Et comme la poudre de tomate pourrait également être utilisée chez l’être humain pour limiter le risque de diabète de type 2, nous préparons actuellement une étude clinique des effets de sa consommation sur la prévention de cette maladie.

Conversation avec EMMA FLACARD

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