La peur survient telle une vague
immobile. Ici, d’un coup,
elle s’insinue :
les constructions connues, les possibles

conséquences prévues (qui n’excluent pas
le pire),
toute la lente maîtrise de l’intelligence
et ses décisions alternatives, tout

se trouble en un instant.
Et seule reste la racine,
un peu comme une antenne douloureuse
tombée on ne sait où, qui palpite.

 

 

Jaime Gil de Biedma, « El miedo sobreviene », Las personas del verbo, Seix Barral, 1982. Traduction inédite de L.C.

 

 

Le Barcelonais Jaime Gil de Biedma a écrit moins de cent poèmes, presque tous avant 40 ans. Certains inoubliables sur le désir, entre tendresse du matin et chambre des machines. L’œuvre, solaire, est pourtant hantée par la fatigue de soi. Comme ces vers tourmentés où l’intelligence tente de saisir l’angoisse qui la dépasse. 

 

 

Vous avez aimé ? Partagez-le !