Nécessaires, pas suffisants
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La France a perdu beaucoup de temps et d’énergie sur la question des masques. Les propos contradictoires du gouvernement au printemps, essentiellement pour dissimuler la pénurie en dépit du bon sens scientifique, ont brouillé le discours qu’il fallait tenir dès le départ sur leur utilité : oui, le port du masque dans l’espace public est nécessaire, et il devrait l’être partout dès que l’on sort de chez soi, dès lors qu’il y a des croisements de population, et en s’épargnant les arguties actuelles pour savoir s’il faut le porter dans telle rue et non dans telle autre. Les masques protègent l’entourage d’une personne contaminée des gouttelettes qu’il pourrait projeter, et ils protègent aussi ceux qui le portent, par exemple lorsqu’ils touchent des surfaces infectées et que le masque les empêche ensuite de se toucher le nez ou la bouche. Mais il ne faut pas se leurrer : les masques ne sont qu’un pis-aller, et l’accent qui est aujourd’hui mis sur leur usage, une forme de contre-feu dommageable face à la reprise de l’épidémie. En affirmant le 4 août dernier que « l’avenir de l’épidémie à court terme est en grande partie entre les mains des citoyens », le conseil scientifique fait porter, de façon assez révoltante, la responsabilité de la santé collective sur les individus. Car le port du masque, s’il est nécessaire, n’est certainement pas suffisant pour enrayer une seconde vague.
La dynamique est aujourd’hui à une reprise de l’épidémie, encore douce mais continue : en témoigne l’augmentation de 50 % des admissions en réanimation depuis la mi-juillet. Cet indicateur est plus fiable que celui du nombre quotidien de cas détectés, dont une étude récente menée par Giulia Pullano a montré qu’il ne représentait que 10 % des cas réels en France. Mais nous ne sommes pas en mesure de les repérer, car notre stratégie de dépistage est inefficiente. Cette crise a débuté il y a six mois, et l’épidémie n’est toujours pas sous contrôle, car nous ne procédons pas à suffisamment de tests et, lorsque nous testons, nous le faisons trop tard ! La connaissance épidémiologique nous permet désormais de savoir qu’environ la moitié des contaminations sont le fait de personnes asymptomatiques ou présymptomatiques, donc contagieuses sans le savoir. D’ailleurs, les personnes qui portent des symptômes sont le plus fortement contagieuses quatre jours avant de les développer et six jours après. On ne peut donc pas espérer enrayer les contaminations en ne testant que les personnes les plus probablement atteintes, ou en limitant la recherche aux contacts des dernières 48 heures. Il faut tester de façon très large, et identifier beaucoup plus rapidement les contacts d’un cas connu.
Cet été en France, environ quatre cas identifiés sur cinq n’étaient pas contacts d’un cas connu : cela signifie qu’au lieu de se concentrer comme on le fait sur des clusters, en famille ou en entreprise, il faut tester la population de façon plus large, y compris grâce à des tests groupés pour tester plus vite et en plus grand nombre des échantillons tests de la population. Ou alors en testant régulièrement les eaux usées des villes, pour repérer rapidement la présence de cas positifs. C’est à cette condition seulement que nous pourrons lutter contre une reprise de l’épidémie. Dire que la responsabilité de la situation revient aux citoyens et à leur bon usage des masques est donc une erreur majeure. L’avenir de l’épidémie est avant tout entre les mains des autorités.
Conversation avec J.B.
« Le masque fait le lien entre ma vulnérabilité et ma responsabilité »
Corine Pelluchon
Après six mois d’atermoiements, de tergiversations, de déclarations hésitantes ou contradictoires, la France a peu à peu imposé au cours de l’été le masque dans son espace public. Les entreprises doivent également se plier à ce nouvel usage qui risque de marquer durablement nos modes de vie. Face…
[Bises]
Robert Solé
Alors que le distanciel et les gestes barrière s’installent dans la durée, il est bon de le rappeler : le port du masque permet de découvrir le plus sincère des sourires, celui qui se fait avec les yeux.
Une adhésion de principe, un casse-tête pratique
Manon Paulic
Arthur Frayer-Laleix
Les sondages sont nets : une très large majorité de Français se déclarent convaincus des vertus du masque pour se protéger, soi et son entourage, du Covid-19. Mais, si le rejet des restrictions sanitaire…