Longtemps, la viande a été un signe de puissance sociale en Occident. Dès le haut Moyen Âge, pour les élites issues des peuples germaniques qui ont conquis le monde gallo-romain, elle est associée à la force, à la vigueur, à la capacité de combattre et de commander. Et ce sont les produits carnés, les aliments supposés les plus nourrissants et les plus échauffants, que le christianisme a interdits lors des jours de pénitence alimentaire. Imposée par l’Église, l’alternance des jours gras et des jours maigres a fortement contribué à conforter la primauté de la viande, la cuisine des jours maigres (sans viande) se définissant par rapport à celle des jours gras. L’évolution même de la langue traduit ce primat absolu du carné. Étymologiquement, la « viande » est ce qui entretient la « vie ». Jusqu’au XVIe siècle, le terme signifie « nourriture » mais, à partir des XVIe-XVIIe siècles, il ne désigne plus que la chair des mammifères et des oiseaux – une mutation sémantique à apprécier dans le contexte d’une culture alimentaire marquée, pour le plus grand nombre, par les céréales et les légumineuses, cette « viande du pauvre ».

Selon un principe d’incorporation symbolique, la chair consommée permet au mangeur de faire sa propre chair. Jusque dans les années 1970, la viande a été associée à

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