« Je n’imaginais pas qu’il pourrait me tirer dessus »
Il y a deux ans Manuel Valls parlait d’une situation d’« apartheid ». Où en sont les banlieues aujourd’hui ? Notre reporter est allée à la rencontre de jeunes, d’éducateurs, de professeurs et de policiers qui évoquent leur quotidien, la solidarité et les tensions. Témoignages recueillis par Manon Paulic.Temps de lecture : 2 minutes
Un habitant de Gennevilliers, 31 ans.
"Il y a six ans, un copain à moi qui roulait en voiture volée s’est fait poursuivre par la police. Ils l’ont interpellé et l’ont frappé au sol, avec leurs pieds et avec une matraque. Mon pote criait d’arrêter. Ils étaient trois sur lui. Il y avait des petits qui regardaient. J’étais là, avec mes potes. On était une vingtaine. On a voulu intervenir pour les séparer. On ne les a pas touchés, on leur a juste demandé d’arrêter. Mais ils ont appelé du renfort et ils ont commencé à nous gazer. Une mère de famille aussi, qui essayait de protéger son fils. Ça a dégénéré. Un flic m’a poursuivi, m’a dit de m’arrêter ou il tirerait avec son Flash-Ball. Je ne l’ai pas cru, je n’imaginais pas qu’il pourrait me tirer dessus. J’ai continué à courir. Il m’a tiré dessus. Il était à une dizaine de mètres. J’ai pris la balle dans la tempe, j’ai encore un trou aujourd’hui. J’ai pas senti la douleur, je suis tombé dans le coma tout de suite. On m’a raconté que les flics étaient partis et m’avaient laissé seul avec les pompiers. Quand je me suis réveillé deux jours plus tard, je ne reconnaissais plus mes parents. Au bout du troisième jour, j’ai commencé à pouvoir parler. J’ai porté plainte et j’ai pris un avocat, mais il n’y a jamais eu de suite parce que j’avais pas vu le visage du flic qui m’avait tiré dessus. Je sais que j’aurais dû me rendre, mais j’étais fiché parce que j’avais fait des conneries avant. J’ai pris du sursis pour agression, menace et défaut de permis. Mais à chaque fois, j’ai coopéré parce que je savais que j’étais en tort. Mais le jour du Flash-Ball, j’avais rien fait. Je m’étais rangé depuis quelque temps, je ne faisais plus de bêtises. J’ai ressenti beaucoup d’injustice. Encore aujourd’hui, ça me rend triste et en colère chaque fois que j’y pense. Ça me touche beaucoup. C’est comme si j’avais pas eu droit à une deuxième chance.
Pour l’histoire de Théo, c’est du jamais-vu. On est tous choqués, c’est au-delà de tout, au-delà de la violence qu’on voit au quotidien. Là aussi, je ne pensais pas que ça pouvait arriver, j’ai du mal à y croire. Il faut vraiment avoir de la haine pour faire ça."
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