Comment définir la culture ? 

Pour moi, l’important, c’est qu’elle soit mobile. Qu’elle soit le contraire d’un trésor fixé, figé, enfermé dans un coffre. Sa valeur ne tient pas du tout à sa brillance ni à sa rareté. Au contraire. J’aimerais insister sur le fait que la culture est mouvement.

C’est ce qu’on voit actuellement en Europe : l’ancienne culture européenne fondée sur les Lumières, la philosophie, les musées, est troublée par un nouvel ordre qu’on pourrait facilement assimiler à la barbarie si on se laissait aller, comme ces partis politiques qui misent sur les différences ethniques et sont très enclins à dénoncer la menace des barbares à nos portes. Je vois même des magazines qui annoncent la chute de l’Occident, comme si nous étions entourés de barbares qui ne demandent qu’une chose : entrer dans la ville pour piller, se faire payer en or et en chair. C’est une vision aberrante.

Avez-vous toujours pensé la culture comme mobile, en mouvement ?

Oui. Je suis moi-même issu d’une culture très mélangée puisque mon père était britannique et que nous étions originaires de l’île Maurice. 

Nous avions donc sans arrêt des informations qui nous arrivaient d’un autre point du monde. Mes lectures, ce n’était pas Le Monde, ce n’était pas Le Figaro, c’était Le Mauricien. Et avoir la vision de ce journal quand on vivait à Nice, c’était assez particulier ! Ce décalage a favorisé chez moi l’idée que la culture n’est pas unique, mais plurielle. Selon le point de vue où vous vous placez, elle n’a pas la même signification. 

Je me souviens qu’après la cérémonie du prix Nobel, nous avons tous été réunis pour discuter de la crise économique. Il y avait des économistes, des chimistes, des biologistes. Après les avoir écoutés, j’ai dit : « Vous savez, la crise économique que vous dénoncez en ce moment, nous la vivons depuis longtemps à l’île Maurice. Et en Afrique, on la vit quasiment depuis toujours. On y vit toujours dans l’à-peu-près, sans être sûr de pouvoir survivre le lendemain. » Cela ne les a pas intéressés du tout ! J’ai dû passer pour un radical tiers-mondiste. 

Certains veulent justement faire croire qu’il y a des cultures supérieures à d’autres. Que leur répondez-vous ?

Je suis absolument hostile à toute hiérarchisation des cultures. Je suis convaincu qu’une grande partie des probl&egra

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