Gergovie, c’est un plateau basaltique de 70 hectares, qui culmine à 750 mètres au-dessus de Clermont-Ferrand, offrant une vue à 360 degrés sur les paysages de la chaîne des Puys, du massif du Sancy et des monts du Forez. Il renferme plus de deux millénaires d’histoire. C’est le haut lieu de l’occupation des Arvernes, un des principaux peuples de Celtes gaulois, et le théâtre de la célèbre bataille de Gergovie qui a opposé Vercingétorix à Jules César et ses légions en 52 av. J.-C. À ces vestiges gallo-romains, profondément enfouis dans les sols du plateau, viennent s’ajouter d’autres traces de présence humaine, notamment l’occupation agricole des siècles suivants, qui a durablement marqué la terre et le paysage à travers les nombreux pierriers, ces amas de pierres retirées du sol pour le cultiver. Le plateau de Gergovie est donc un véritable « sol patrimoine », porteur d’une histoire sédimentée au fil du temps. On estime d’ailleurs que, si les fouilles ont commencé dès l’époque napoléonienne, seulement 2 à 4 % du site a été excavé. Tout reste donc encore à découvrir pour les archéologues qui y travaillent !

Mais le plateau de Gergovie n’est pas pour autant figé dans son histoire. Sur le « sol patrimoine » se trouve aussi un sol vivant renfermant une incroyable biodiversité : des fleurs, des arbres, de nombreux insectes, des serpents nichés dans les pierriers et des oiseaux dans les pelouses rases et dans les arbres. Les brebis, véritables tondeuses des surfaces herbeuses, contribuent, elles aussi, au maintien d’un paysage ouvert. Les rats taupiers, eux, entretiennent une collaboration tout à fait fortuite, et fructueuse, avec les archéologues, puisqu’en creusant leurs galeries, ils remontent à la surface des vestiges d’objets enfouis dans le sous-sol. Les archéologues ont donc pris l’habitude de fouiller régulièrement les taupinières du secteur. Prendre en compte le « sol patrimoine », c’est enfin composer avec la fréquentation du site par les habitants de Clermont, qui viennent y profiter de la nature, de même que par les nombreux touristes attirés par son histoire millénaire.

L’enjeu est précisément là : comment protéger et valoriser les trésors de ce sol, en explorer les 98 % qui nous sont encore inconnus, dans un équilibre fragile entre mémoire, patrimoine, biodiversité et tourisme ? La technologie apporte une première réponse à ce défi, car elle rend possible une archéologie beaucoup moins invasive. Grâce, notamment, à la télédétection par laser (Lidar), qui permet de scanner les microreliefs du plateau de manière très précise. Autre clé : l’étude de toutes les interactions humaines et non humaines avec le sol du plateau dans l’objectif de révéler les dimensions invisibles des liens qui fondent cet écosystème territorial. Du fait de la richesse historique du plateau, il est ainsi interdit d’y creuser le moindre trou : les enclos des éleveurs sont mobiles, et les panneaux touristiques posés sur des plots pour ne pas altérer le sol et ses vestiges. À Gergovie, histoire et géographie vont de pair et doivent collaborer avec l’archéologie pour assurer le bon équilibre entre terre et patrimoine et valoriser un tourisme respectueux de toutes les richesses du site, des sols jusqu’aux paysages. 

 

Conversation avec LOU HÉLIOT

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