Entre cent et mille ans. C’est le temps qu’il faut à un simple centimètre de terre pour se former. Dans cette petite pincée de matière, on trouvera alors plusieurs milliards de micro-organismes – des bactéries, des champignons microscopiques, qui lui donneront vie. Entre les racines, les bulbes et les graines qui se seront progressivement ancrés dans ce sol s’installeront des insectes, les célèbres lombrics et même de petits mammifères. Toute une faune souterraine qui garantira en retour le dynamisme et la santé de la terre.
Nous qui vivons à sa surface, nous oublions parfois que le sol que nous cultivons, sur lequel nous construisons nos maisons, est aussi et surtout une épaisseur vivante, pour laquelle nous avons bien peu d’égard. Après tout, nous rappelle Gaspard Koenig dans les pages de ce 1, « les philosophes ont longtemps méprisé le sol et les passions terrestres au profit des cieux et de l’ordre cosmique ». Menacés par l’artificialisation, l’érosion, l’assèchement ou encore la pollution, nos sols demandent aujourd’hui un peu d’attention.
Qu’y a-t-il vraiment sous nos pieds ? Et comment protéger nos sols, leur richesse et leur diversité ? C’est tout l’enjeu de ce numéro du 1 hebdo, imaginé avec ses partenaires, le programme recherche-action, qui croise les savoirs scientifiques et l’expertise de terrain pour faire évoluer villes et territoires, et le Festival international de géographie, qui se tiendra à Saint-Dié-des-Vosges du 4 au 6 octobre. Avec eux, nous avons arpenté les territoires de France et exploré les richesses écologiques et archéologiques cachées sous nos pieds. Nous avons rencontré des chercheurs qui imaginent de nouvelles manières de protéger et d’habiter nos sols. Pour que l’on reconnaisse enfin, pour reprendre les mots des géographes Adrien Baysse-Lainé et Florence Nussbaum, directeurs scientifiques du Festival de géographie, que « les sols sont aussi essentiels que l’air et l’eau, et que l’on ne peut plus les traiter comme de simples commodités ».