La France périurbaine est à la croisée de toutes les terres : elle est à la fois rurale et dans l’orbite des villes. Elle abrite aussi bien des habitations, des zones d’activité et des infrastructures que des jardins, des forêts ou des champs. Elle concentre donc toutes les problématiques liées à la terre, de la protection de la biodiversité à la pollution des sols, en passant par l’artificialisation et la transformation des terres agricoles en terrains à bâtir.

Les débats se cristallisent tout particulièrement sur les quartiers pavillonnaires. D’un côté, ils concrétisent pour des millions de ménages un idéal très ancien, celui de la « ville à la campagne » ; d’un autre côté, les pavillons ont mauvaise presse chez les urbanistes. On les assimile à l’usage de la voiture, aux pelouses sans vie et à la surconsommation de ce que les urbanistes, dans leur jargon, appellent les Enaf, les espaces naturels, agricoles et forestiers.

« Il faut promouvoir et soutenir la gestion écologique des jardins. »

Ils ne méritent toutefois pas entièrement la sévérité qu’on leur témoigne. En effet, les recherches ont montré que les quartiers pavillonnaires périurbains sont ceux qui accueillent le plus de biodiversité en France, après évidemment les espaces naturels. Il y a donc un vrai enjeu de protection, de valorisation et de promotion de la biodiversité des jardins périurbains, et il faut en premier lieu mener un travail de sensibilisation. La tentation est toujours grande de bâtir des carports, des piscines, de couvrir son jardin de gravier pour en faciliter l’entretien… Face à ces pratiques, il faut promouvoir et soutenir la gestion écologique des jardins. D’ailleurs, on le voit déjà, les mentalités sont en train de changer ! Rappelons qu’il n’y a pas si longtemps, les règlements de lotissement interdisaient les potagers, dans le souci d’afficher un certain standing et de se distinguer du « mode de vie paysan ». Ces règlements, lorsqu’ils existent encore, sont de moins en moins respectés. Le potager a la cote dans les classes supérieures.

La réglementation a ici un rôle à jouer : aujourd’hui, on peut imposer des coefficients de pleine terre dans les règlements d’urbanisme. On a également interdit dans les jardins individuels l’usage des produits phytosanitaires chimiques comme le fameux Roundup. Au niveau du territoire, après les « trames vertes et bleues », qui visent à préserver des corridors écologiques sur terre et dans les milieux aquatiques pour que les espèces animales puissent circuler, s’alimenter et se reproduire, on parle de plus en plus de « trames brunes ». Celles-ci s’attachent à protéger des bandes de sol et leur biodiversité, leurs capacités de stockage d’eau et de carbone, etc.

Ces mesures posent naturellement la question de l’artificialisation des sols, qui est au cœur des problématiques périurbaines : d’un côté, la nécessité de protéger la valeur écologique et vivrière des sols ; de l’autre, le besoin de loger une population dont la demande d’habitats ne décélère pas, dans un pays où le nombre de ménages est en croissance. Or, si l’on veut construire en évitant l’étalement urbain, il faut densifier, donc potentiellement construire sur des jardins. Une double injonction qui va avec son lot de tensions, notamment autour de l’objectif « zéro artificialisation nette » (ZAN). S’il vise à protéger de la construction les espaces agricoles et naturels, saura-t-il préserver les jardins ? 

 

Conversation avec L.H.

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