Pour beaucoup d’entre nous, la cryptomonnaie n’existe que sous la forme de bitcoin ou d’ethereum… Pourtant, on en décompte à ce jour plus de 10 000, et leur nombre ne cesse d’augmenter. Pourquoi ? La raison est simple : n’importe qui peut en créer. Les cryptomonnaies n’ont pas la forme physique d’une pièce ou d’un billet, et elles ne sont ni régulées ni indexées sur l’or ou le dollar. Ce sont au contraire des suites de chiffres cryptées qui s’échangent de pair à pair, c’est-à-dire directement entre utilisateurs, sans l’intermédiaire des banques. Rien de bien sorcier pour des développeurs aguerris. Une simple recherche sur Internet permet d’accéder à toutes sortes de guides expliquant, étape par étape, comment créer sa propre monnaie. On peut même en définir les propriétés : la quantité de pièces en circulation, la vitesse de transaction, le niveau de sécurisation, et surtout son utilisation. Quelques exemples de cryptomonnaies pour illustrer leur grande diversité.

 

Le basic attention token (BAT)

Lancé en 2016 par l’un des créateurs du navigateur Mozilla Firefox, le basic attention token (BAT) fonctionne en association avec le moteur de recherche Brave. Son principe est simple : « récompenser l’attention ». Lorsqu’un internaute navigue sur Internet, une grande partie de son attention est captée par les publicités. Brave se propose de rémunérer cette attention. Il suffit de télécharger le navigateur Brave en quelques clics, puis d’utiliser Internet comme on le ferait sur Edge, Chrome, Safari ou Firefox. La seule différence : les publicités visionnées font maintenant gagner des « tokens », ou « jetons », c’est-à-dire des unités de cryptomonnaie. Ces jetons peuvent être conservés et convertis en euros, ou reversés sous forme de don à des créateurs de contenu sur toutes sortes de sites comme Wikipédia, Twitter, YouTube, etc. On peut même les programmer de sorte qu’ils soient automatiquement transférés aux sites auxquels on accorde le plus de temps. Avec l’introduction du basic attention token, Brave entend mettre fin au monopole de Google et Facebook, qui contrôle 75 % de la publicité en ligne, et rémunérer les créateurs de manière plus équitable. Le tout en préservant la vie privée des utilisateurs, puisque toutes les transactions sont anonymes et que Brave ne conserve aucune des données des utilisateurs.

 

Monero

Mettre en circulation une cryptomonnaie aussi anonyme que des pièces ou des billets, c’est le pari de Monero, dont la cryptomonnaie, créée en 2014, a rapidement séduit une large communauté. À l’inverse du bitcoin et de la majorité des cryptomonnaies qui sont facilement traçables, Monero utilise un système d’obscurcissement de la blockchain empêchant toute identification de celui qui envoie comme de celui qui reçoit, ainsi que du montant échangé. Comme l’explique Robin Berné, directeur général du site français d’information sur la cryptomonnaie Cryptoast : « Monero se situe dans la droite ligne des cypherpunks, un mouvement qui remonte aux années 1980. Le cypherpunk s’appuie sur la cryptographie pour protéger la vie privée sur Internet et empêcher les États ou les entreprises d’avoir une emprise sur les transactions. » Cette garantie d’anonymat en fait bien évidemment une cryptomonnaie de choix pour les transactions illégales. Le monero, dont le nom signifie « monnaie » en espéranto, est désormais la deuxième monnaie la plus utilisée sur le Dark Web, la partie non indexée de la Toile qui abrite de multiples activités clandestines et illégales. Au point que le FBI et plusieurs autres agences de renseignement sont déjà en train de développer des techniques pour la décrypter.

Dogecoin

À l’origine, le dogecoin était censé n’être qu’une simple blague. Ce jeton à l’effigie d’un chien Shiba Inu, très populaire sur Internet, avait d’abord été lancé pour « se moquer des autres cryptomonnaies », rappelle Robin Berné. Ce qu’avait d’ailleurs ouvertement revendiqué son créateur, Billy Markus, qui parlait du dogecoin comme d’une « parodie ». Pourtant, le jeton séduit. Un mois après sa mise en ligne, la capitalisation du dogecoin atteint déjà 60 millions de dollars (49,5 millions d’euros). Il est parfois utilisé pour faire des dons à des créateurs de contenu sur Twitter ou sur Twitch, et c’est tout. « Le dogecoin n’a vraiment aucune utilité réelle, remarque Robin Berné, or il continue de se maintenir parmi les cryptomonnaies les plus cotées ! »

Son succès est étroitement lié au soutien que lui a apporté l’entrepreneur milliardaire Elon Musk, grand adepte des cryptomonnaies. En février dernier, Musk tweetait une série de phrases sibyllines vantant le dogecoin comme « la cryptomonnaie du peuple ». En l’espace de quarante minutes, celui-ci grimpait de 45 %, illustrant du même coup la volatilité extrême de ce genre de cryptomonnaies.

 

Uniswap

Uniswap est la cryptomonnaie associée à la plateforme du même nom, qui constitue une sorte de bourse aux cryptomonnaies. Cette plateforme décentralisée fonctionne sans conseil d’administration ni autorité centrale. Ce sont les détenteurs des jetons qui en assurent la gestion. Ces jetons leur permettent de voter sur des questions concernant l’évolution de la plateforme, sur le montant des frais, sa gestion, etc. Plus l’utilisateur possède de jetons, plus son vote a de poids. Ces « jetons de gouvernance » sont de plus en plus répandus.

 

Lugh

Normalien et ingénieur des Mines, ancien conseiller pour les innovations et les nouvelles technologies du gouvernement de Villepin, l’entrepreneur et investisseur Olivier Ou Ramdane a lancé en mars dernier la cryptomonnaie lugh. Développée en partenariat avec le groupe Casino et soutenue par la Société générale et la plateforme française d’échange Coinhouse, lugh est l’une des toutes premières « stablecoin » adossées à l’euro. « Une stablecoin, nous explique Olivier Ou Ramdane, c’est une cryptomonnaie, donc un actif numérique, adossée à une monnaie qui a un cours légal. » Ce qui permet à cet actif numérique de ne pas être volatil, puisque la stablecoin vaut toujours une unité de la monnaie de référence. « Un lugh sera toujours égal à un euro », précise son fondateur. Pour garantir cette stabilité, l’entreprise a d’ailleurs ouvert un compte de réserve à la Société générale, « avec une somme d’euros égale au nombre de lughs en circulation ». Pourquoi dès lors recourir aux stablecoins ? « Il y avait une vraie demande, nous confirme l’ingénieur, la communauté crypto attendait depuis très longtemps un stablecoin adossé à l’euro, tout simplement pour éviter d’inutiles allers-retours entre les actifs numériques et le système bancaire. » Convertir ses cryptomonnaies en stablecoins permet en effet d’en garantir la valeur en euros sans avoir à rentrer dans le système bancaire, avec tout ce que cela implique de délais et de taxes. Depuis son lancement mi-mai, plus de 8,5 millions de Lugh ont déjà été émis. Mais le projet ne s’arrête pas là. « La stablecoin, ce n’est que la première étape », explique Olivier Ou Ramdane. L’entrepreneur ambitionne en effet de révolutionner les programmes de fidélité. « D’ici à 2022 ou 2023, nous voulons faire du lugh un moyen de paiement de la vie quotidienne qui intègre directement les récompenses de fidélité. » L’idée consiste à programmer la cryptomonnaie pour qu’elle prenne en compte tous les avantages client : « Vous aurez votre wallet, votre “portefeuille numérique” avec toutes vos cryptos qui vous permettront de payer en ayant automatiquement tous les avantages associés à votre profil de client. Plus besoin de sortir des dizaines de cartes de fidélité ! » Pour se mettre en place, un tel projet nécessite bien sûr la participation de multiples enseignes. « Nous avons le soutien de la chaîne Casino. Il reste encore du chemin à parcourir, mais la stablecoin est là ! » 

 

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