Ils ont d’abord été « sidérés », comme « pris dans les phares d’une voiture ». « En gueule de bois. » En tant qu’enseignants, ils n’imaginaient pas devenir un jour la cible du terrorisme. Il y avait bien eu cette menace, après les attentats du 13 novembre 2015 : l’État islamique appelait à attaquer l’école de la République et ses enseignants, à « tuer tous ces corrupteurs », ces défenseurs de la laïcité. Mais avec le temps, au contact de leurs élèves, ils ont fini par refouler ce risque au fond de leur inconscient. Quand ce vendredi 16 octobre 2020, ils ont appris la décapitation de leur confrère, la mémoire leur est revenue brutalement.

Au lendemain du drame de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), certains sont d’abord réticents à s’exprimer tandis que d’autres prennent volontiers la parole, mais tous partagent le même sentiment : la crainte que l’on fasse de cet événement dramatique un « problème d’école ». « Je ne me sens pas attaquée dans ma fonction », confie Miriam Fenoulhet, professeure d’anglais en lycée professionnel, à Paris. Elle s’interroge davantage sur le risque de « récupération » et la manière dont elle abordera la question avec ses élèves. Diane Granoux, professeure d’histoire-géographie au lycée, à Bagnolet, abonde : aussi terrible que soit l’événement, « je n’ai pas le sentiment que l’école de la République soit menacée ». Nombre d’enseignants préfèrent considérer l’assassinat de Samuel Paty comme « un acte isolé ».

Ils n’hésitent pas à défendre une image positive de leurs élèves, à contre-courant des préjugés exacerbés par l’émoti

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