L’imam n’est pas sûr de la solidité de la foi de Nasr Eddin : aussi un jour, à la sortie de l’office du vendredi, l’aborde-t-il en ces termes :

– Nasr Eddin, ton père Abdullah – qu’Allah l’ait en Sa sainte garde ! – était un croyant irréprochable, mais toi, souvent, j’en doute…

– Ne te fais aucun souci à mon sujet, le rassure le Hodja, ma foi est inébranlable comme un roc.

– Quelle preuve peux-tu m’en donner ?

– Eh bien, je crois que tout dans ce monde va selon la volonté d’Allah. N’est-ce pas la preuve ?

– C’est facile à dire, mais comment cela se manifeste-t-il à ton avis ?

– Oh, la manifestation est évidente et permanente : rien, dans ce monde, ne va jamais avec ma volonté à moi !

Sublimes paroles et idioties de Nasr Eddin Hodja, traduit par Jean-Louis Maunoury
© Éditions Phébus, 2002

 

L’irrévérence ne fut pas toujours proscrite en terre d’Islam. En témoignent les historiettes de Nasr Eddin Hodja, nées en Turquie au XIIIe siècle. Elles mettent en scène un personnage bouffon, guignol socratique, dont les dialogues révèlent la myopie des morales dans notre monde incompréhensible. Un sage loufoque qui n’hésite pas à interpeller même son Dieu. 

 

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