Les histoires de Nasr Eddin Hodja, le plus absurde des sages, sont nées en Turquie au XIIIe siècle. Rien ne sert d’écoper si vous êtes pris dans une tempête, enseigne-t-il. Mieux vaut faire le contraire : se mettre du côté du plus fort et jeter l’eau de la mer dans son bateau. Faisons-nous autre chose face au dérèglement climatique ? 

À une sécheresse de plusieurs mois avait succédé la famine. Mais tout le monde ne mourait pas de faim pour autant : les riches avaient pris soin de faire d’amples réserves de blé, d’huile, de légumes secs et de viande séchée.
Khadidja dit alors à son mari :
– Nasr Eddin, toute la ville te tient pour un homme de poids. Ne reste pas les bras croisés ; va sur la place, rassemble tout le monde, et tente de convaincre les riches de donner à manger aux pauvres.
Nasr Eddin trouve pour une fois que sa femme a raison. Il fait comme elle dit et, deux heures après, rentre, la mine réjouie.
– Ma femme, rendons grâce à Allah le Miséricordieux !
– Ah ! Tu as donc réussi ?
– Ce n’était pas une mission facile. À moitié. 
– Comment cela, à moitié ?  
– Oui : j’ai réussi à convaincre les pauvres.

Sublimes paroles et idioties de Nasr Eddin Hodja, traduit par Jean-Louis Maunoury
© Éditions Phébus, 2002

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