Les promesses des ARN
La crise sanitaire mondiale l’a soudain mis en lumière. Avant de faire une entrée fracassante dans nos vies avec les vaccins contre le Covid, il était infiniment moins connu que son cousin l’ADN et largement ignoré du grand public. Les scientifiques, eux, misent sur l’ARN depuis plusieurs décennies. Ou plutôt sur les ARN, la molécule pouvant prendre différentes formes et assurer différentes fonctions dans la cellule. Capable d’induire la synthèse de protéines ou au contraire de l’inhiber, ou encore de servir de guide aux fameux « ciseaux moléculaires » Crispr-Cas9, l’ARN pourrait devenir une classe de médicaments révolutionnaire, susceptible de soigner pléthore d’affections, du cancer aux maladies rares. Même si, en matière de recherche médicale, la plus grande prudence s’impose. Tour d’horizon de ses promesses.Temps de lecture : 11 minutes
l’ADN et l’ARN
L’ARN copie de l’ADN
L’adn est double brin ; il est pérenne et ne quitte presque jamais le noyau de la cellule.Contrairement à l’ADN, l’ARN ne forme qu’un seul brin. Il est beaucoup plus fragile que l’adn et se dégrade très rapidement. Il existe plusieurs types d’arn : les arn messagers (ARNm), qui codent la fabrication de protéines, et des arn non codants, comme l’arn interférent.
L’ARN messager
Créer des protéines
L’ARN messager thérapeutique injecté dans l’organisme est un ARN messager synthétique, fabriqué in vitro. Une fois dans la cellule, il est traduit en protéine par les ribosomes. La technologie à ARN messager utilise la machinerie cellulaire pour lui faire synthétiser des protéines spécifiques « à la demande ». Un moyen révolutionnaire pour fournir au corps une protéine censée faire réagir le système immunitaire – comme dans la vaccination – ou une protéine qui, en faisant défaut, entraîne un état pathologique. La thérapie par ARN messager ouvre, a priori, un très grand champ des possibles. Entamée il y a plus de vingt ans, la recherche autour de l’ARNm est en plein boom depuis son éclatante réussite contre le coronavirus. « 2020 a été un accélérateur extraordinaire, qui va permettre de réinvestir de l’argent dans la recherche sur l’ARNm, dans toutes sortes d’utilisations », se réjouit Steve Pascolo, un des pionniers de la technologie ARNm et cofondateur de CureVac, le troisième laboratoire dans la course au vaccin. Mais la prudence s’impose à ce stade : malgré l’immense potentiel de l’ARNm, les applications thérapeutiques concrètes sont encore rares.
Le vaccin arn contre le covid-19
La vaccination classique repose sur l’administration d’un agent infectieux atténué ou inactivé qui va déclencher une réponse immunitaire dirigée contre le pathogène. Les vaccins contre le Covid de Pfizer-BioNTech et de Moderna, développés en moins d’un an, reposent sur la technologie de l’ARNm, plus efficace et plus rapide. Le principe est d’apporter à l’organisme un petit morceau du « plan de fabrication » du Sars-CoV-2, sous la forme d’un ARNm qui code pour la protéine Spike, une protéine caractéristique du virus, située à sa surface et qui permet à notre corps de le détecter. Le brin d’ARNm est encapsulé dans une bulle lipidique, qui lui permet d’atteindre les cellules musculaires et d’y pénétrer facilement. Une fois administré dans le bras, le vaccin met nos cellules à contribution et leur laisse le soin de produire elles-mêmes la protéine Spike : elle permet d’éduquer notre système immunitaire et de le préparer à réagir si le « vrai virus » surgit.
Des recherches tous azimuts
En cancérologie
La technologie à ARNm pourrait devenir une arme de plus dans la lutte contre le cancer. L’idée n’est pas nouvelle : les recherches en cancérologie sont antérieures à la pandémie de Covid-19.
Lorsque les cellules deviennent cancéreuses, elles expriment à leur surface des protéines mutées – qu’on appelle des néoantigènes tu
« On connaissait l’ARN, mais on ne croyait pas qu’il pourrait guérir »
Michel Morange
« Je ne parlerais pas de révolution scientifique mais d’une prise de conscience à retardement d’une révolution des connaissances qui, elle, s’est produite il y a cinquante ou soixante ans. » Le biologiste Michel Morange revient sur la somme de travaux de fourmi qu’a nécessitée l’étude de ces ARN…
[Épithète]
Robert Solé
VOICI un sigle moins froid que tous ceux qui ont enrichi notre vocabulaire ces dernières années. Contrairement à l’ADN, la FIV ou la PMA, l’ARN dont on parle le plus aujourd’hui est accompagné d’un adjectif : il est messager.
Les promesses des ARN
La pandémie l’a soudain sorti de l’ombre des laboratoires, mais les scientifiques misent sur l’ARN depuis plusieurs décennies. Ou plutôt sur les ARN, la molécule pouvant prendre différentes formes et assurer différentes fonctions dans la cellule. Capable d’induire la synthèse de protéines ou au c…