États-unis : il est interdit d’interdire
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NEW YORK. Un État ou une municipalité ont-ils le droit de restreindre ou d’interdire la mendicité ? Ce débat divise les États-Unis depuis longtemps. Dans les années 1990, le maire républicain de New York, Rudi Giuliani, s’était bâti une notoriété en expulsant mendiants et sans-logis des rues du cœur historique de la ville, Manhattan, sous le motif de lutter contre la criminalité. Giuliani incarnait la propension, présente en de très nombreux lieux aux États-Unis, à éradiquer la mendicité dans l’intention de préserver l’ordre public. Selon cette vision, le mendiant est d’abord un parasite social.
Mais cette tendance se heurte à des obstacles juridiques récurrents. En premier lieu, celui de la Cour suprême, qui a de nouveau confirmé, dans une décision de mai 2016, le placement de la mendicité publique sous la protection du premier amendement de la Constitution américaine – c’est-à-dire du droit à la libre expression. Du Maine à l’Arizona en passant par le Colorado, l’Oklahoma et nombre d’autres États, cette décision avait été suivie par une série de cours locales qui avaient interdit l’application de lois ou de règlements bannissant ou limitant la mendicité. Un tribunal de Springfield, dans l’Illinois, la ville du président Abraham Lincoln, où Barack Obama annonça en 2007 sa candidature à l’élection présidentielle, dut ainsi mettre un terme à l’interdiction de la mendicité qu’elle avait imposée dans son centre-ville.
Pour autant, la volonté de résorber la mendicité continue d’être très présente – et ce d’autant plus que celle-ci a clairement augmenté avec la crise économique de 2008-2009. À Cheyenne, dans le Wyoming, une polémique a éclaté en juillet 2017 autour d’une campagne de la police locale visant à stigmatiser les mendiants. Dénoncée par les associations de défense des libertés civiles, la police locale a finalement changé son fusil d’épaule : elle a appelé les citadins à ne pas verser d’obole aux mendiants, mais à offrir, s’ils le souhaitaient, une contribution aux associations caritatives. Sous-entendu : donner l’aumône à un mendiant, et il en profitera pour acheter de l’alcool, des cigarettes ou pire. En finançant les associations caritatives, au moins votre argent ne sera-t-il pas perdu…
« On les souhaite invisibles car on n’a pas envie que ça existe »
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Dans votre livre, vous citez l’abbé Pierre qui expliquait que l’opinion est « plus sans savoir que sans cœur ». Pouvez-vous nous dire ce qu’on ne sait pas ?
D’abord, que les mendiants ne sont pas si nombreux …
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