La question des rapports entre le monde politique et la société civile ne se pose pas vraiment en Suède. D’abord parce que le secteur public, à tous les points de vue, est pratiquement inexistant dans ce pays, notamment depuis la libéralisation de l’économie entamée il y a une vingtaine d’années. Mais aussi parce que les rapports entre les hommes politiques et les citoyens y sont bien différents. Certes, l’immense majorité, voire la totalité des ministres sont issus des partis politiques qui dirigent le pays dans des gouvernements de coalition. Ainsi Isabella Lövin, l’actuelle ministre de la Coopération au développement, a beau être journaliste et l’auteur de Silent Seas – un best-seller international sur les dangers de la pêche industrielle, paru en 2007 –, elle n’en a pas moins rejoint le parti des Verts avant d’être élue au Parlement européen puis de faire son entrée au gouvernement. À la différence, donc, d’un Nicolas Hulot qui se fait fort de n’appartenir à aucun parti. 

Cette omniprésence des partis politiques ne signifie pas que les « apparatchiks » aient les mains entièrement libres. Bien au contraire, les ministres font l’objet d’une surveillance continue de la part des citoyens, au point que certains se sont retrouvés épinglés parce qu’ils n’avaient pas débarrassé leur plateau-repas à la cantine du ministère ou avaient acheté des chocolats avec la carte de crédit de leur administration. De plus, ces mêmes ministres ont beaucoup moins de pouvoir qu’en France. Au temps du mariage, aujourd’hui révolu, entre Renault et Volvo, les dirigeants de la firme suédoise étaient sidérés de voir des ministres français vouloir se mêler de leurs affaires. 

Enfin, le Riksdag, considéré comme un des plus vieux parlements du monde, exerce un contrôle de tous les instants sur le gouvernement. « Les députés perdent rarement contact avec les citoyens de base, confirme un diplomate européen. Ils savent qu’ils leur sont redevables. » Bref, dans une société essentiellement consensuelle, où le compromis semble être, plus qu’une méthode de gouvernement, un véritable art de vivre, le divorce entre politique et société civile semble bien être un débat «  typiquement franco-français ». 

JOSÉ-ALAIN FRALON 

 

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