Officiellement, Christine*, 61 ans, sera à la retraite en mai 2023. Elle en sourit. Elle l’aurait presque oublié. C’est que Christine n’a plus exercé aucun emploi rémunéré depuis dix-sept ans. Un cas hors norme, d’autant qu’en 2017, le taux d’activité des personnes en âge de travailler en France était à son plus haut niveau depuis 1975. « J’ai arrêté de travailler en 2006, le jour de mes 45 ans. J’étais parvenue à mettre suffisamment de côté », déclare-t-elle. Du coup, on ne sait pas bien si l’on doit ou non la qualifier de « retraitée ». Tout dépend de la définition que l’on a de ce terme.

« Arrêter de travailler à 45 ans et vivre de mes économies, c’est une promesse que je m’étais faite dix ans plus tôt », poursuit-elle. À l’époque, son emploi de secrétaire de mairie dans une petite commune de Haute-Savoie ne l’enchante guère. Elle s’y ennuie, lassée de s’asseoir tous les jours à la même place, de faire les mêmes tâches, de discuter avec les mêmes gens. « C’était la routine. J’avais 35 ans et cela faisait dix-sept ans que je faisais la même chose. Je ne m’épanouissais plus. » Contrainte de travailler depuis ses 18 ans pour raisons familiales, Christine avait pris cet emploi de fonctionnaire territoriale sans penser qu’il deviendrait pérenne. « Si j’avais eu le choix, je serais devenue professeure d’anglais ou traductrice », explique-t-elle.

Alors, en 2006, Christine met en pratique ce qu’elle s’est promis dix ans plus tôt. Elle met en vente le chalet qu’elle a acheté et retapé elle-même des années auparavant et en tire une somme importante : 500 000 euros. Grâce au tourisme, l’immobilier se porte bien en Haute-Savoie. Elle place une partie de cet argent et s’offre une retraite très anticipée. À moins de 50 ans.

Elle vit aujourd’hui au Maroc, dans l’une des principales villes du pays. Des 500 000 euros du chalet, une partie lui a servi à acheter un appartement de 90 mètres carrés avec deux chambres et une terrasse. Célibataire et sans enfant, elle y coule une vie routinière et paisible, dit-elle, en compagnie de son chat Bouly. Elle dit, modestement : « J’ai réalisé mon petit rêve. » Revenant aux années où elle était salariée en France, elle ajoute : « C’est comme une autre vie que j’aurais eue avant. »

L’histoire de Christine a de quoi surprendre. Elle n’est pourtant pas unique. D’autres personnes, comme elle, ont fait le choix d’une « retraite atypique ». Comprendre : une retraite décorrélée des sacro-saintes 42 annuités

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