De l’émeute à la manif, et inversement
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La manifestation de rue, qui s’invente au mitan du xixe siècle, se déploie sur le même terrain que les cortèges processionnels, religieux, corporatifs ou festifs, qui est également celui des insurrections, émeutes ou attroupements. Mais si elle emprunte aux premiers, elle se définit par sa distance aux seconds. Avec la grève, elle constituerait le cœur du répertoire d’action collective contemporain décrit par l’historien Charles Tilly, en lien avec un processus tendanciel de pacification des conflits sociaux et politiques. Pourtant, ce répertoire semble aujourd’hui travaillé par des tensions qui conduisent à s’interroger sur le retour des soulèvements populaires et de la forme insurrection.
Du sujet au citoyen
La naissance de la IIIe République en France marque l’entrée dans un monde où, le sujet devenant citoyen, il n’est plus possible d’opposer au mouvement ouvrier les fusils Lebel et autres baïonnettes de la troupe. Le pouvoir politique cherche alors à briser la dynamique des émeutes sanglantes, des insurrections et des révolutions – le souvenir de la Commune de Paris est encore vif – pour instaurer une paix publique dans laquelle l’État serait à la fois le garant de la libre expression des opinions et le meilleur rempart contre l’anarchie.
C’est dans cette perspective que sont créées en 1921 les premières unités spécialisées de maintien de l’ordre – les pelotons de gendarmerie mobile –, véritable « troisième force » destinée autant à éviter les exactions de l’armée – la fusillade de Fourmies de 1891 n’est pas si lointaine – qu’à parer à l’incapacité technique des forces policières classiques. C’est dans la même perspective que seront mises en place les compagnies républicaines de sécurité (CRS) après la Seconde Guerre mondiale.
Ainsi se développe la lente et progressive institutionnalisation du recours à la rue, avec d’un côté la pratique réglée et routinière du défilé de rue – les premiers services d’ordre apparaissent au début du siècle – et, de l’autre, l’habitude prise par la police de s´accommoder de cet &ea
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