La France est un pays doté d’armes nucléaires depuis le début des années 1960. Pendant la guerre froide, elle a développé un arsenal varié comprenant des avions bombardiers, des missiles sol-sol, des sous-marins lanceurs de missiles balistiques et des armes nucléaires dites tactiques. Depuis 1996 et la fermeture du site de missiles du plateau d’Albion, deux composantes des forces nucléaires subsistent.

La première est la force aérienne stratégique. Elle compte une quarantaine d’avions équipés de missiles de croisière et devrait à partir de 2018 ne plus comprendre que des Rafales. Chacun de ces appareils peut emporter une tête nucléaire d’une puissance équivalente à l’explosion de 300 000 tonnes de TNT, soit environ vingt fois la capacité de destruction et trois fois le rayon de l’effet de souffle de la bombe lancée à Hiroshima en 1945. L’explosion d’une telle arme au-dessus de Paris détruirait complètement la ville intramuros et tuerait potentiellement plus d’un million de personnes, sans compter les blessés. 

La seconde composante est la force océanique stratégique, basée à l’île Longue, en Bretagne. Elle est constituée de quatre sous-marins lanceurs d’engins de type Triomphant, tous récemment remis ou en train d’être remis à neuf. Il y a en permanence au moins un bâtiment en mission opérationnelle, prêt à faire feu si l’ordre en est donné par le président de la République. Chaque sous-marin peut emporter jusqu’à 16 missiles balistiques M51 capables de délivrer plusieurs têtes nucléaires à différents endroits sur sa trajectoire, de sorte qu’il leur est possible de frapper plusieurs cibles à des milliers de kilomètres en moins de 20-30 minutes. La liste actuelle des cibles potentielles reste secrète mais a été historiquement concentrée sur la Russie.

Bien que la France ait arrêté la production de plutonium et d’uranium enrichi de qualité militaire nécessaire à la fabrication des armes, les stocks actuels sont suffisants pour maintenir l’arsenal en l’état pendant des milliers d’années et pourraient, d’après les estimations, supporter une augmentation du nombre d’armes par quatre. 

La France détient quelque 300 ogives. Officiellement, le dimensionnement de l’arsenal français est régi par le principe de « stricte suffisance », c’est-à-dire que le nombre d’armes nucléaires est censé correspondre au minimum requis pour présenter aux adversaires de la France une menace crédible de dommages inacceptables. À titre de comparaison, les États-Unis et la Russie possèdent chacun plus de 6 000 têtes nucléaires, dont 2 000 sont déployées ; les autres pays dotés d’armes nucléaires en ont de plusieurs dizaines (Corée du Nord, Israël, Inde, Pakistan) à quelques centaines (Chine et Royaume-Uni).

Toutefois, la recherche académique a montré que les arsenaux nucléaires sont rarement des instruments au service d’une stratégie préétablie. Souvent, la doctrine est formulée en fonction des capacités créées et les différents niveaux de rhétorique ne coïncident pas avec les capacités opérationnelles. Ainsi, la « modernisation » des forces nucléaires françaises, déjà décidée pour les prochaines années, sera plutôt un remplacement en l’état des systèmes actuels sans innovation particulièrement majeure. Ces remplacements doivent doubler le budget annuel de la dissuasion au moins durant la période d’acquisition des équipements les plus importants. Ils entraîneront aussi des coûts à long terme pour les Français d’aujourd’hui et de demain jusqu’à la fin du xxie siècle en tenant compte du cycle de vie complet de ces armes. 

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