La liberté. Elle guida ses pas, toute sa vie… Jean-Claude Carrière avait élu domicile dans le 9e arrondissement de Paris, rue Victor-Massé, ou plutôt sa maison habitait Jean-Claude Carrière. Une bâtisse blottie derrière une porte cochère, à son image, enracinée, élégante et discrète. Elle fut son havre de paix, une étoile lumineuse nourrissant sa création. Il l’acquiert en 1976.

Elle était justement située presque à mi-chemin entre la rue des Martyrs et le quartier de Pigalle. Pigalle la dévergondée, Martyrs la prudente. Jean-Claude Carrière s’enfonça dans les limbes de ce quartier aux mille visages. Femmes-réverbères, tabac, heures souterraines, temps suspendus, rencontres interlopes. Pigalle était pour lui comme une sorte de respiration, une parenthèse joyeuse, un défi aux conventions bourgeoises.

Puis il revenait dans sa maison, retrouvait le silence et le chant des oiseaux posés sur les branches des arbres centenaires plantés au milieu de la cour, comme s’ils lui parlaient, lui disaient merci, sentant en cet homme un ami de la terre et de sa beauté.

Beaucoup plus tard, je le croisais chez des commerçants de la rue des Martyrs. Je l’observais. Il m’impressionnait par son regard, par cette voix envoûtante. Puis nous nous croisâmes d’autres fois. Il était en famille. Un homme parmi les hommes. Un de ces dimanches paisibles où l’on achète ses fruits et légumes et toutes les bonnes choses qui feront la réussite du déjeuner dominical. Au loin, le manège scintillant, partout des familiers du quartier, des enfants… et le square, au pied du Sacré-Cœur, où il emmenait Kiara, sa fille encore enfant. Ce square portera bientôt son nom. Jean-Claude Carrière était un être spirituel, conscient avant l’heure de la fragilité de l’environnement. Dans cet écrin de verdure, il poursuivra son dialogue intérieur avec le monde et les astres. 

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