Que s’est-il passé, chers camarades ? Nous n’avons pourtant pas cessé de dénoncer le racisme et la xénophobie. Rappelez-vous : le Front national, isolé par un cordon sanitaire, ne pouvait même pas s’exprimer dans les grands médias. Et malheur à qui s’interrogeait sur le port du voile ou l’insécurité : on fustigeait aussitôt la France moisie et la lepénisation des esprits !

La moindre provocation verbale du leader d’extrême droite, la moindre bavure policière à l’égard d’un fils d’immigré nous faisait descendre dans la rue. Nos gouvernants payaient cher une phrase politiquement incorrecte. On les accusait de courir après Le Pen, en leur rappelant que les électeurs « préfèrent l’original à la copie ». C’est nous qui donnions le ton. Certaines évidences ne se discutaient pas : l’immigration était « une chance pour la France », la France « une société multiculturelle », et « le droit à la différence » un fondement de la liberté.

Que s’est-il passé, mes chers camarades ? Aurions-nous une petite part de responsabilité dans la progression vertigineuse des idées que nous combattions ? Aurions-nous par hasard fait l’autruche au lieu de nous pencher sérieusement sur des questions complexes et dérangeantes ?

Si je suis élu président de la République au printemps prochain, je m’adresserai à la nation en lui disant que nous ne savons ni accueillir les immigrés, ni expulser les sans-papiers, ni retenir ceux qui veulent passer en Angleterre. Que nous cherchons des solutions, n’avons plus besoin de discours bien sentis, mais d’actes concrets, même modestes, de la part de chacun. Je suggérerai par exemple à ceux qui sont bien logés d’héberger une famille kurde, éthiopienne ou afghane, disons pour quelques mois… Non, non, rassurez-vous, je n’ai aucune chance d’être élu. 

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