Sur le bureau du Dr Steven Laureys, au 5e étage du centre hospitalier universitaire de Liège, une cervelle trône au milieu d’une assiette. « C’est le cerveau de Matthieu Ricard ! » lance le neurologue belge, en saisissant la reproduction en 3D de l’encéphale du moine bouddhiste, souvenir d’une récente collaboration. 

Depuis une vingtaine d’années, Matthieu Ricard quitte régulièrement son ermitage népalais pour participer à des études scientifiques à travers le monde en tant que chercheur et cobaye. L’objectif est toujours le même : observer l’influence de la méditation sur la structure et le fonctionnement du cerveau. Avec plus de 60 000 heures de pratique à son actif et la volonté féroce de faire avancer la recherche, le septuagénaire est un allié pour les neuroscientifiques, tout comme d’autres moines qui, eux aussi, se prêtent parfois à l’exercice. Selon Steven Laureys, grand spécialiste du coma et de la conscience, « il est important d’écouter ces athlètes de l’esprit ».

En 2015, c’est donc dans le laboratoire Giga, en Belgique, que Matthieu Ricard s’est à nouveau soumis à une batterie de tests, des centaines d’électrodes fixées sur le crâne, pour analyser l’impact de la méditation sur les différents réseaux de conscience du cerveau. Les deux principaux sont le réseau externe, qui permet de percevoir son environnement, et le réseau interne, centre de fabrication de la rêverie et des images mentales. L’étude a mis en évidence qu’« en fonction du type de méditation pratiquée, des réseaux de conscience différents s’activent et changent de dynamique ». 

Depuis l’émergence, dans les années 1970, des neurosciences contemplatives, à savoir l’étude de l’entraînement de l’esprit sur la structure cérébrale, trois types de méditation sont le plus souvent étudiées, en fonction de leur objet : la compassion, l’attention focalisée (sur la respiration, par exemple) ou la présence ouverte, un état que Matthieu Ricard décrit comme « extrêmement lucide mais pas très réactif ». Ces deux derniers, associés, constituent la pleine conscience. 

Mais, à l’occasion de cette étude, Steven Laureys s’est également intéressé à une forme de méditation particulière qui consiste à réduire le flux de ses pensées, « une sorte d’état zombie », selon lui. Sur le cerveau de Matthieu Ricard, en pleine méditation, il a pratiqué un test qu’il a davantage l’habitude de réaliser sur des patients comateux. Il s’agit de stimuler la matière grise grâce à une technique particulière – l’électroencéphalogramme combiné à une stimulation magnétique transcrânienne –, puis d’enregistrer l’activité électrique du cerveau et de la mesurer. Sur une personne lambda éveillée, celle-ci varie très peu, que cette personne soit somnolente ou très vive. « Généralement, on observe une vraie variation uniqu

Vous avez aimé ? Partagez-le !