Comment faire le pire avec le meilleur ? Le sport, en France, est à l’image d’un pays qui néglige le sens des choses et oublie sa grandeur. De dérive en dérive, nous sommes en train de saccager l’immense travail civique accompli par des milliers de clubs qui, eux, donnent un sens fabuleux à la pratique sportive de nos jeunes. 

De l’ancien président de l’UEFA, qui se posait jadis en chantre de l’éthique et qui, au final, se révèle un petit tricheur pris la main dans le sac, aux paris truqués des handballeurs, en passant par ce président de la Fédération de tennis qui fait son petit business sur les billets, où va-t-on ?

Mais il y a peut-être plus grave encore.

Comment expliquer l’ahurissante absence de parole publique, de grand discours d’un responsable quel qu’il soit, politique ou sportif… Aucun n’ose prendre la parole et siffler la fin de la honte. La vérité est que chacun d’entre eux – souvent des hommes, d’ailleurs, plutôt blancs, assez âgés – pratique l’entre-soi. Entre crèmeries. Le pouvoir sportif est à présent hors-sol, et l’un des plus conservateurs et des plus archaïques qui soient. Il est incapable de saisir ce qui se passe réellement sur le terrain, dans nos quartiers. 

Il suffit de voir comment la candidature pour les JO 2024 est conduite : sans joie, sans débat populaire, sans vie, à la techno, entre initiés qui se répartissent le gâteau. Un petit commerce. Les quartiers qui produisent nos champions en sont absents. L’arbre est sec. À quand un grand discours rassembleur et visionnaire ? À quand un Ryadh Sallem, magnifique athlète, champion hors norme et incarnation des valeurs de la République, au centre de cette candidature qui devrait être populaire, joyeuse et proche des gens ?

 

L’éthique n’est plus qu’un concept commode et juteux, remarquablement utilisé par certaines firmes à l’occasion des grands événements sportifs pour vendre leurs boissons ou leurs voitures. La communication s’agrippe au sport pour lustrer le pire des scénarios. L’Euro 2016, qui rapportera des centaines de millions à l’UEFA et à ses partenaires, est le symbole de ces événements hors-sol où seul l’argent joue sa partie. 

Sans morale, sans valeurs, le sport aura bien du mal à survivre, comme toute société d’ailleurs. 

Depuis vingt ans, le concours « Fais-nous rêver », soutenu par les Zèbres, repère et accompagne les grands leaders français de terrain qui, par le sport, changent des milliers de destins. 

C’est le cas à Sevran, par exemple, où le club de football local regroupe plus de mille adhérents. Un espace unique de diversité : on y croise des jeunes, des adultes, des chefs d’entreprise, des ouvriers. On y vient pour voir son pote, passer de bons moments mais aussi se donner des coups de main. Eh bien, disons-le : ce lieu est aussi important que le collège d’à côté ! On y apprend réellement à être, à exiger de soi une performance ou à respecter l’effort de l’autre. Pas de République vivante sans endroits où mettre notre devise en pratique avec jubilation. 

Il y a dans notre pays des centaines de pépites de ce niveau. Tous ces lieux d’exception sont pilotés par des entraîneurs hors norme, à la Jean-Claude Perrin. Ces grands citoyens pensent qu’entraîner l’autre, c’est le faire grandir. 

 

Quel grand projet populaire notre pays peut-il écrire ? 

La France, c’est évident, a besoin d’un renouveau autour d’un grand projet sportif. La dimension d’insertion des jeunes est une priorité nationale. Les clubs sportifs, soutenus par les politiques sportives des villes, peuvent demain devenir des lieux de recrutement de nos jeunes par les entreprises qui respectent nos valeurs, notre sens de l’effort, notre culture de la détermination. Des lieux où nos jeunes dégoûtés par les institutions trouvent un soutien réel. À l’instar des compagnons du Tour de France. Sachons de nouveau accompagner toute une jeunesse laissée au bord de la route.

Les entraîneurs, ces coachs d’un pays qui ne demande qu’à réussir, doivent redevenir le socle, la pierre angulaire des politiques publiques sportives. Nous appelons les élus locaux, les associations, les établissements scolaires, les missions locales et autres à se réunir et construire partout en France des politiques nouvelles pour les citoyens. 

La bonne nouvelle ? Nous avons commencé ! 

Ces nouvelles politiques sportives joyeuses sont déjà en route dans treize villes françaises, cinq régions. Elles ont déjà démarré, par exemple, à Calais où la formidable maire Natacha Bouchart a mis en place un groupe de quatorze éducateurs sportifs dédié à la réussite scolaire et à l’insertion des jeunes. À Vaulx-en-Velin, la courageuse maire et maintenant ministre de la Ville Hélène Geoffroy souhaite que les animateurs sportifs soient mieux formés pour accompagner les jeunes. À Nice, l’ancien champion de moto et président de région Christian Estrosi veut insérer les jeunes dans les entreprises locales. À Épinal, le maire pionnier Michel Heinrich s’efforce d’associer le sport à la culture. 

Enfin, le monde de l’entreprise est aussi en marche à nos côtés. LCL a montré l’exemple. La banque embauche désormais 10 % de son personnel dans les quartiers par l’intermédiaire de nos clubs sportifs. Le vrai pouvoir sportif est celui qui agit, qui change le destin de l’autre, qui décloisonne. 

Plus que d’un ministère sans projet à la hauteur de la France, les acteurs du sport ont besoin de programmes très concrets, ambitieux et furieusement utiles pour les citoyens. Faisons-les ! 

 

 

 

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