En Argentine, « Viva la libertad, carajo »
Temps de lecture : 2 minutes
Depuis l’arrivée au pouvoir de Javier Milei, le 10 décembre 2023, l’Argentine a dégringolé de vingt-six places dans le classement annuel de la liberté de la presse dans le monde établi par Reporters sans frontières. Le président ultralibéral a exigé la fermeture de Télam, la principale agence de presse du pays, la taxant d’organe de « propagande kirchneriste » – du nom de deux anciens présidents de centre gauche. Il accuse également l’entreprise de coûter trop cher au gouvernement. Le 4 mars 2024, les locaux de la rédaction ont été condamnés par de hautes barrières métalliques et un important dispositif policier. Les 700 salariés ont été informés par mail que leurs activités seraient suspendues pour les sept jours suivants. Un plan de départ « volontaire » a été proposé et accepté par 35 % des journalistes. Le site internet ayant été suspendu, le reste de la rédaction a mis en ligne une alternative qu’elle alimente tant bien que mal, Somos Télam.
Par ce barrage mis en place par la force, Milei – qui avait pour slogan de campagne « Viva la libertad, carajo » (« Vive la liberté, bordel ») – confirme ses intentions ouvertement hostiles à la presse. En plus d’encourager publiquement les agressions envers les journalistes, il qualifie leur profession de « pire égout du monde ». La presse publique argentine se voit par ailleurs menacée par le « méga-décret » du 20 décembre 2023. L’objectif du président Milei était d’abroger plus de 300 normes économiques pour venir à bout de l’inflation. Seulement, son article 48 prévoit la transformation des entreprises publiques en sociétés anonymes en vue de leur privatisation, un processus qui fragiliserait considérablement les médias. Après des manifestations dans tout le pays, le Sénat a réussi à empêcher l’entrée en vigueur du décret à 42 voix contre 25 à la mi-mars. Qu’à cela ne tienne : le président a allégé le texte pour le présenter à nouveau à la Chambre des députés, qui l’a approuvé le 30 avril. Reste à passer le vote du Sénat, une épreuve plus complexe puisque Javier Milei n’y dispose pas d’une majorité suffisante.
M. V.
« Il y a un risque de criminalisation de l’expression des citoyens »
Dominique Rousseau
Le professeur de droit Dominique Rousseau revient sur le processus de grignotage des libertés publiques, de plus en plus marqué depuis 2014-2015, et en analyse les conséquences et les risques.
[Antanaclase]
Robert Solé
« On me permettra de rappeler ici à celles et à ceux qui l’auraient oublié que le polyptote ne se confond pas avec l’antanaclase. » Le mot de Robert Solé.
« Cette liberté, au cœur de nos valeurs, est devenue un totem politique »
Denis Ramond
Le politiste Denis Ramond montre comment les opposants de tous bords se sont emparés de la défense de la liberté d’expression pour en faire une arme politique, tout en soulignant que leur combat, qui, par certains aspects, peut tenir de l’instrumentalisation, répond aussi à de véritables atteinte…