Pendant longtemps, les sans-diplôme, ou dropouts, comme on les appelle aux États-Unis, c’est-à-dire les jeunes de 18 à 24 ans sans high school diploma (ou « diplôme de lycée » – il n’existe pas là-bas de baccalauréat), constituaient un des problèmes majeurs du système éducatif américain. Ainsi, en l’an 2000, selon le National Center for Education Statistics, ces dropouts représentaient encore 10,9 % de leur classe d’âge. 

La surprise, c’est qu’en 2015 ils n’étaient plus que 5,9 % !

Une baisse impressionnante, de près de moitié, qui s’explique d’abord par une détermination politique affichée : dès 2001, le No Child Left Behind Act a rendu les districts (mini-académies) responsables des résultats de leurs écoles. Mais aussi, et surtout, par la mise en place de stratégies efficaces, au premier rang desquelles il s’est agi d’identifier très tôt les jeunes à risque. Issus pour la plupart de familles socioéconomiquement défavorisées, souvent monoparentales, sans adulte investi dans leur vie, les décrocheurs présentent deux caractéristiques principales : d’une part, de sérieuses difficultés scolaires ; d’autre part, un désengagement vis-à-vis de l’école. Les statistiques sont claires : les élèves de sixième qui sont fréquemment absents (moins de 80 % du temps), ont fini l’année avec un F en maths, en anglais, ou encore en « comportement », n’ont plus que 10 % de chances d’obtenir leur diplôme de lycée en quatre ans (aux États-Unis, le lycée commence en troisième), et 20 % en cinq ans – c’est ce que révèle un rapport des professeurs Balfanz et Herzog de 2005. En quatrième, avec les mêmes caractéristiques, les élèves ont 25 % de chances d’obtenir leur diplôme en huit ans, selon le rapport Neild et Balfanz de 2006.

Un autre aspect de la stratégie mise en place par les pouvoirs publics consiste à renforcer les interventions dans les classes de transition comme la sixième et la troisième, reconnues comme particulièrement délicates. En effet, aux États-Unis, l’élève de sixième n’appartient plus à un « groupe classe ». Il est tout seul et navigue de classe en classe sans avoir les mêmes condisciples de l’une à l’autre, ce qui, ajouté à la plus grande exigence du programme et au moindre suivi des enseignants, désoriente les plus fragiles. À l’entrée du lycée, cet état de fait se complique plus encore par tout un système d’options différentes et un contrôle plus relâché de la part des enseignants.

Des chercheurs du Federal School Dropout Demonstration Assistance Program, après avoir suivi quatre expériences menées auprès d’élèves à risque dans différents États, ont révélé que les actions au coup par coup n’ont aucun effet. Il faut des mesures intensives comme des classes à effectifs réduits, des cours de soutien tout au long de l’année permettant aux élèves en difficulté de rattraper leur retard avant qu’ils ne se sentent submergés, un suivi continu de la part de conseillers pédagogiques et de psychologues scolaires. Les collèges et lycées qui ont réussi à voir baisser le taux des dropouts ont mis en place un réseau serré impliquant, autant que possible, le jeune, sa famille, des membres de la communauté tels que des conseillers pédagogiques, des assistantes sociales, des enseignants, des profs de sport qui se concertent entre eux, peuvent agir rapidement et créent un climat de confiance et de complicité entre l’école et le jeune. Enfin, contrairement à ce que certains seraient tentés de penser, la solution n’est pas dans la baisse de la difficulté des cours offerts. Toutes choses égales par ailleurs, les lycées qui offrent des cours rigoureux, exigeants et correspondant au programme plutôt que des cours faciles, ont des taux de diplômés bien supérieurs aux autres. 

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