Lenteur excessive de la lumière du matin qui tarde à monter. Au café, le double express que l’on m’a servi est excellent, chose rare aux abords des gares. Le Havre se réveille sous un ciel plombé. On me demande si je désire un croissant. Je remercie poliment le cafetier, j’ai mal au cœur. Sans doute l’appréhension. Ce n’est pas la première fois que je me rends dans une maison d’arrêt pour animer un atelier d’écriture. Les détenus apprécient les rencontres avec les écrivains. La fondation qui m’envoie cette fois-ci m’a recommandé auprès du quartier des mineurs. Ce matin, je vois l’un des garçons. Je ne sais rien de lui. On m’a dit qu’on m’expliquerait son cas sur le chemin de la prison.

Une femme entre dans le café, arborant un grand sourire. C’est presque trop. Elle pile sur moi et me serre la main. – Vous êtes Paul, je suppose ? Je lui réponds que c’est bien moi. – La maison d’arrêt est à l’extérieur de la ville. On en a pour un bon quart d’heure.

Dans la voiture, Julie – c’est son prénom – ne cesse de parler. Je ne desserre pas la mâchoire. Me contente de hocher de la tête pour dire oui à tout ce qu’elle me raconte, quoi qu’elle me raconte. Le mal de cœur est plus intense que tout à l’heure : l’effet du jeûne combiné à celui de l’appréhension qui doit monter. Elle parle

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