UN BUSTE en bronze d’Alain Peyrefitte trône depuis 2002 dans le campus de l’université de Wuhan. Pour ceux qui l’auraient oublié, ce « grand ami du peuple chinois » a été ministre sous de Gaulle, Pompidou et Giscard d’Estaing. Il est l’auteur d’un best-seller traduit en quinze langues et vendu à 2 millions d’exemplaires : Quand la Chine s’éveillera… le monde tremblera (Fayard, 1973), titre inspiré d’une phrase que Napoléon aurait prononcée à Sainte-Hélène.

Peyrefitte n’était pas sinologue et ne connaissait pas un mot de chinois : c’est à la suite d’une visite de dix-neuf jours à la tête d’une délégation de parlementaires français qu’il avait entrepris d’écrire ce livre. Compte tenu de sa taille, affirmait-il, l’empire du Milieu finira par s’imposer sur la scène internationale dès qu’il disposera d’une technologie de pointe. En ne datant pas cet « éveil », le Français ne prenait pas beaucoup de risques. Mais, d’une plume talentueuse, il révélait une foule de choses sur la Chine, qui était alors au dernier stade de la Révolution culturelle. Entre l’enfer dénoncé par des victimes de cette folle entreprise et le paradis décrit par des intellectuels maolâtres, il voulait offrir un regard équilibré.

En 1996, après être retourné à diverses reprises à Pékin, Peyrefitte, devenu académicien, publiait un livre censé confirmer ses prévisions : La Chine s’est éveillée. La mort de cet Immortel, en 1999, nous a malheureusement privés de plusieurs suites possibles : La Chine s’est levée, La Chine s’est mise en marche, La Chine a commencé à galoper… Mais si le monde tremble depuis des mois, ce n’est pas en raison de la cavalcade de ce géant ; c’est la faute d’un méchant virus surgi à Wuhan. 

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