La nouvelle année chinoise, placée sous le signe du rat, a commencé à Wuhan, métropole industrielle au bord du Yangzi, sous de bien mauvais auspices avec l’émergence d’une étrange maladie provoquée par un nouveau coronavirus.

Le reste du monde commentait alors avec commisération et distanciation les mœurs bizarres d’une population croyant aux pouvoirs guérisseurs des ailes de chauves-souris et des écailles de pangolins. Puis sont venus l’effarement et la réprobation devant la gestion autoritaire et radicale de la crise sanitaire, notamment face à l’assignation à résidence des 56 millions d’habitants de la province du Hubei que seul, à nos yeux, un pays totalitaire pouvait concevoir.

L’économie chinoise a été mise à l’arrêt. Les Cassandre en Occident ont, comme à chaque crise, annoncé, non sans une certaine joie mauvaise – la Schadenfreude –, l’effondrement de la Chine. D’autres ont cru y voir un effet Tchernobyl où la dissimulation initiale des faits conduirait à une politique d’ouverture et de transparence. C’était mal connaître le rejet total par les dirigeants de Pékin de l’expérience Gorbatchev, jugée responsable de la disparition du Parti communiste russe et de l’éclatement de l’Union soviétique.

Les critiques ont porté sur la dissimulation de la gravité de la crise, la réduction au silence des lanceurs d’alerte, les pressions sur l’OMS pour retarder l’annonce de la transmission d’homme à homme de la pandémie, puis la diplomatie des masques surjouée par Pékin. Le ton a changé en conséquence : la méfiance et l’hostilité dominent désormais. Sans parler de la croisade tous azimuts et du blocus technologique de Donald Trump, cherchant un bouc émissaire et mettant au défi Joe Biden d’être aussi antichinois que lui, quand il a compris que les effets de la pandémie risquaient de lui faire perdre les élections. À la fin de cette année toutefois, de nombreux pays confinés, déconfinés puis reconfinés vont passer des fêtes de fin d’année moroses, accusant une forte récession, un taux de chômage élevé, et des faillites de petites et moyennes entreprises en cascade.

En Chine, quelles que soient les polémiques sur les chiffres officiels de la mortalité due au Covid-19, l’épidémie a été jugulée, et l’activité économique a repris. La Chine est le seul pays du G20 à avoir renoué avec la croissance, à hauteur de 1,9 %, en 2020. Facteur positif, les moteurs de la croissance ont été réorientés des exportations et des investissements vers la consommation intérieure et les services. La guerre des tarifs de Trump n’a pas permis de réduire le déficit commercial américain. En outre, malgré les souhaits affichés de relocalisations, le marché chinois reste attractif pour les grandes entreprises étrangères : General Motors vend plus d’automobiles en Chine qu’aux États-Unis ! La Chine se repositionne donc comme le moteur de la croissance mondiale.

L’année finit également en beauté avec la signature surprise du plus grand accord de libre-échange mondial, le RCEP, qui concerne quinze pays d’Asie, soit 30 % de la population et du PNB mondiaux – réponse au retrait malavisé des États-Unis, en 2016, du TPP qui excluait la Chine. Dans cette partie de ping-pong sino-américain, au moment du pitoyable refus de Trump de concéder la victoire en cette fin d’année 2020, la Chine décroche un morceau de lune et peut apparaître comme la première puissance mondiale. Mais attention à l’hubris et au choc en retour ! 

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