On l’appelle The Stranger aux États-Unis, mais The Outsider en Grande-Bretagne : depuis 1946, l’œuvre d’Albert Camus est connue sous deux titres différents de part et d’autre de l’Atlantique. Faut-il y voir une subtile distinction culturelle ? Ou une de ces bizarreries éditoriales que prisent les universitaires ? Dans En quête de « L’Étranger » (Gallimard, 2016), Alice Kaplan fait la biographie de ce roman désormais traduit en plus de soixante langues. Et raconte comment, à la sortie de la guerre, les éditeurs anglo-saxons Knopf (aux États-Unis) et Hamilton (en Angleterre) achètent séparément les droits de publication du livre, puis décident de se partager les coûts de la traduction. Cette tâche est confiée à Stuart Gilbert, qui inscrit The Stranger sur son manuscrit… Mais ce choix reste une prérogative de l’éditeur. Et, parce qu’un roman polonais vient de paraître en Angleterre sous ce titre, Hamilton choisit finalement The Outsider, qu’il trouve « plus frappant et approprié ». Il informe tardivement les Knopf de sa décision : les couvertures américaines sont déjà imprimées. Aux États-Unis, le livre paraîtra donc sous le titre prévu par le traducteur.

L’histoire pourrait paraître anecdotique. Mais elle illustre bien la difficulté de traduire le mot français étranger. Car il ne

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