Ma mère était espagnole, je l’ai souvent dit.

Née dans un village de la Haute-Catalogne, elle échoua, après une longue marche, dans un village du sud-ouest de la France en février 1939, où elle vécut jusqu’à sa mort.

Ma mère, que j’aimais, est toujours vivante en ma mémoire. Mais jamais je ne pense à elle comme à une étrangère.

Jamais.

Bien sûr elle malmenait le français, bien sûr elle disait n’avoir pas les manières idoines, bien sûr elle se sentait regardée comme venant d’ailleurs, bien sûr elle continuait à cuisiner en espagnol, à chanter en espagnol, à rire en espagnol, à s’encolérer en espagnol, à jurer en espagnol et à rêver en espagnol.

Mais alors pourquoi ma mère échappe-t-elle à mes yeux à ce qualificatif d’étrangère dont elle avait pourtant le statut administratif ?

Et pourquoi les migrants syriens, ukrainiens, afghans, kurdes, maghrébins…, dont la nationalité n’est pas la mienne, ne me semblent pas, non plus, relever de cette qualificat

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