En 1999 Time Magazine attribuait à Albert Einstein le titre de personnage le plus influent du XXe siècle. En 2019, c’était au tour de Greta Thunberg de trôner à la une du même magazine. Le premier est un scientifique de génie, la seconde un symbole médiatique. Vingt ans séparent ces deux couvertures, vingt années pour changer de paradigme. Greta a tué Einstein, car au travers de sa grève des cours, l’adolescente a incarné la perte de confiance en la science prométhéenne, celle qui nous aidait à repousser les limites. Point d’orgue d’un mouvement de contestation qui s’est installé progressivement.

À coups d’agit-prop et de principe de précaution, les ONG écologistes s’en sont prises aux totems de notre civilisation technocentrée ; elles ont stigmatisé les OGM, le nucléaire civil, les antennes-relais, la 5G et le glyphosate, pour ne citer que quelques-uns des épouvantails les plus célèbres. Le travail a été si bien fait qu’il est devenu tabou de modifier le génome, de fissionner l’atome, de diffuser des ondes, ou encore de répandre des molécules issues de la chimie de synthèse. La science prométhéenne est tombée de son piédestal et doit désormais faire face à un procès permanent.

Aujourd’hui, seules les solutions estampillées « made in nature » ont la confiance du public, un label qui nous laisse penser que, si elle pouvait parler, ce sont elles que la nature choisirait… Et c’est là qu’on a vu opérer la magie surnaturelle du naturel : les campagnes de publicité qui lavent plus vert ont contribué à passer l’éponge sur les nombreuses externalités négatives, à tel point que l’on a oublié que pour cultiver bio, il fallait davantage d’espace pour obtenir les mêmes rendements ; que pour construire des éoliennes, il fallait des terres rares ; que la « sobriété carbone » des véhicules électriques dépendait des énergies nécessaires à leur production (charbon ou nucléaire) ; quant aux médecines douces – plus « naturelles », elles aussi –, elles sont restées bien impuissantes face à la pandémie.

Parce qu’ils n’ont jamais pris la peine d’entrer dans l’arène politique pour défendre leur œuvre et parce qu’ils pensaient que le progrès devait couler de source, qu’il n’avait pas besoin d’être expliqué au grand public, les défenseurs de la science prométhéenne se sont retrouvés relégués au second plan et se sont vu dicter leur agenda par des idéologues qui avaient tout intérêt à opposer l’homme et la nature et imposer la décroissance. On aurait tort toutefois de s’abandonner au chant des sirènes collapsologues. Pourquoi n’essayons-nous pas de redonner sa chance à la science pour démontrer l’existence d’un continuum homme-nature ?

Quoi de mieux que les nouvelles biotechnologies et les ciseaux moléculaires CRISPR/Cas 9 pour modifier le vivant sans transgresser la barrière des espèces et produire des plantes moins gourmandes en eau ? Quoi de mieux que l’agriculture intelligente armée de ses drones, de ses capteurs et de sa blockchain, pour produire en quantité suffisante de quoi nourrir l’humanité sans nuire à l’environnement ? Quoi de mieux que le nucléaire pour produire une énergie abondante, décarbonée et bon marché ? Quoi de mieux enfin qu’une intelligence artificielle non fantasmée pour assister l’homme dans ses tâches les plus difficiles, telles que la conception de vaccins ? Contrairement à ce que certains voudraient nous faire croire, la science prométhéenne a encore de nombreux tours dans son sac. Surtout, elle reste la mieux placée pour connaître ladite nature et proposer des solutions qui garantissent le meilleur équilibre possible entre l’homme et son environnement. 

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