Notre glorieuse République démocratique, populaire, égalitaire et sociale ne peut tolérer la diffusion de livres pernicieux, portant atteinte à la morale, à la religion, à la sûreté publique, à l’intégrité territoriale ou aux symboles nationaux. Trop d’écrits réussissent à passer entre les mailles de la censure. C’est pourquoi des moyens supplémentaires seront accordés dès ce mois-ci aux fonctionnaires chargés de l’imprimatur. On constate néanmoins un fâcheux paradoxe : des ouvrages mis à l’index, mais imprimés en cachette, provoquent un intérêt particulier et finissent par trouver plus de lecteurs que s’ils avaient été autorisés.

Censurer ne signifie pas forcément interdire ou même expurger. Il est possible de redresser un roman ou un essai douteux s’il n’exprime pas de bout en bout une doctrine perverse. Supprimer des pages n’empêche pas d’en enrichir d’autres. Un censeur doit être doté d’une bonne gomme, mais aussi d’une jolie plume.

Nombre de livres sont cependant publiés hors de nos frontières et circulent sous le manteau. Les mettre au pilon ne suffit pas. Les gouverneurs des provinces sont invités à organiser plus fréquemment des autodafés. Ces cérémonies publiques ont une valeur pédagogique : il ne s’agit pas seulement, par le feu, de brûler l’impureté, mais de purifier les esprits.

Cela dit, un État démocratique ne peut se limiter à la répression. On n’insistera jamais assez sur l’éducation. Dans un monde pollué par les fake news, les citoyens doivent apprendre à distinguer le vrai du faux. La fusion récente du ministère de l’Instruction publique et de la direction des Renseignements généraux n’a pas d’autre but : il faut, à la fois, éduquer la jeunesse et rééduquer les écrivains déviants. 

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