Qu’est-ce qu’une chanson ? Ce sont des couplets et un refrain qui revient. Cette répétition définit la chanson, plus encore que la narration. C’est elle qui permet qu’on retienne ce refrain. Pour moi, la chanson a une vocation collective, sociale, parce qu’elle est faite pour bercer et pour être répétée, interprétée et réinterprétée par tous ceux qui l’entendent. Elle est comme un relais, une lumière qui se transmet de personne à personne. J’aimerais que dans deux cents ans mes chansons soient chantées même si on ne sait plus qui les a écrites. Une chanson, c’est un cierge allumé collectivement au moment où on la chante, mais elle traverse les âges. 

Quand une chanson parle de politique, on dit qu’il y a du fond et qu’elle s’adresse à la société, mais je pense qu’une berceuse a la même fonction. Ce qui compte, c’est la façon dont on chante. Sur mon dernier disque, j’ai voulu une douceur, ferme et puissante. En soi, cela constitue un message pour la société. Il n’est pas nécessaire de dire littéralement ce que je crois être bon pour elle. La chanson, par le seul fait qu’elle est et qu’elle continue à exister, constitue un lien social et c’est crucial aujourd’hui. Il est essentiel que les gens continuent à se regrouper.

Il existe toutes sortes de chansons : pour bercer, pour accompagner les morts, les mariages ou les festins. Il y en a pour la maternité ou pour les révolutions. La chanson peut avoir toutes les fonctions qu’on veut lui donner, mais toutes ces fonctions sont sociales, qu’elles soient dans le poétique ou le politique, dans la tendresse ou la colère. Juliette Gréco, cette merveilleuse dame, disait que toutes les chansons d’amour sont révolutionnaires et que toutes les chansons révolutionnaires sont des chansons d’amour.

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