Oblomovchtchina

Le meilleur, le plus solide, le plus convaincant, le plus bel argument en faveur de la paresse, sans lequel aucune étude de cette question ne serait complète, peut se résumer en un seul mot : Oblomov.

Ilia Ilitch Oblomov, le plus paresseux de tous les indolents de la noblesse terrienne russe du XIXe siècle, et le héros – oui, le héros ! – du roman d’Ivan Aleksandrovitch ­Gontcharov qui porte son nom est l’opposé complet du ­Marcel insomniaque de Proust. Marcel, nous le savons, a longtemps eu l’habitude de se coucher de bonne heure et il lui a fallu un temps inconcevable, des douzaines et des douzaines de pages somnolentes emplies de longues phrases, pour s’endormir pour de bon. Oblomov, au contraire, passe ses journées au lit, parfois bien éveillé, parfois somnolent ; il lui faut cent cinquante pages non pour s’endormir mais au contraire pour se lever. Et quand il finit vraiment par sortir de son lit, il n’est pas drapé dans le rythme apaisant de la phrase proustienne ; il n’est pas contemplatif mais en colère. Et la raison de cette colère est toute simple. C’est la faute de Zakhar son valet de chambre et souffre-­douleur

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