En octobre 2007, Le Monde, dont j’étais depuis peu le directeur, avait obtenu un grand entretien avec Christophe de Margerie, alors PDG de Total. On l’interrogea sur les activités critiquables de sa société en Birmanie. Les accusations étaient sérieuses : le pétrolier était soupçonné de recourir au travail forcé sous la férule de la junte militaire. Le puissant patron avait répondu à nos questions sans se dérober. Il n’était pas question de lui tendre un piège. Or c’est ce matin-là, évidemment, que Plantu me présenta un dessin au canon. On y voyait un camion de Total conduit par un soldat fonçant dans la jungle birmane, et écrasant sur son passage des malheureux frappés par d’autres soldats. Après discussion avec la rédaction en chef, on estima déloyal de publier ce dessin alors que Christophe de Margerie nous avait accordé sa confiance et abordait ce sujet épineux des pratiques esclavagistes. Jean accepta notre décision et, d’un commun accord, nous attendîmes vingt-quatre heures pour publier ce dessin explosif en page 2. Dans la rédaction, le bruit se répandit aussitôt : j’avais censuré Plantu. La Société des rédacteurs (SRM), toujours prompte à diaboliser sa direction, avait déjà prévenu quelques confrères d’autres journaux. Les fausses nouvelle

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