Plantée devant sa webcam, Mariama Seidi, 20 ans, tient son journal intime de confinement. « Avec le Covid-19, tout est devenu plus visible », commente la jeune femme, sa chambre en toile de fond. Elle expose son regard sur l’école et son besoin de réforme, sur les inégalités sociales, rendues plus visibles par la crise sanitaire. Elle partage ses espoirs pour le futur, rêve à voix haute d’une « société plus égalitaire, plus solidaire ».

Depuis cinq ans, Mariama participe aux projets multimédias du vidéaste français Irvin Anneix. C’est une manière pour elle d’exprimer ses points de vue sur le monde, de « participer au débat ». Passionné par le passage de l’adolescence, Irvin Anneix collecte les journaux intimes de jeunes par milliers, les invite à parler face caméra des sujets qui leur tiennent à cœur. « Les jeunes ont le sentiment de ne pas avoir leur place dans les médias traditionnels et que leur avis est rarement pris en compte », constate l’artiste, dont le cœur du travail est d’offrir aux adolescents un espace pour s’exprimer.

Car, malgré une désaffection certaine pour le vote et une méfiance grandissante envers les institutions et les médias traditionnels, « la nouvelle génération se distingue très clairement des précédentes par sa volonté de participer de manière plus directe au débat démocratique », souligne Laurent Lardeux, sociologue chargé d’études à l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (INJEP). Elle a aussi à cœur d’agir : l’enquête « S’engager pour la démocratie » (INJEP, 2019) met en évidence des jeunes davantage sensibles à une logique de transformation sociale et politique.

Alors, pour se faire entendre, les jeunes empruntent des chemins de traverse. « Ils s’expriment et s’engagent différemment, expérimentent une démocratie plus participative, plus directe, et moins représentative », explique Laurent Lardeux. « Moi, je ne vote pas, assume Robespierre Ganro, 19 ans, étudiant installé à Bobigny, en Seine-Saint-Denis. Franchement, ça ne sert à rien. Si je veux me faire entendre, je vais sur les réseaux sociaux et je me joins à une cause. Il faut être en groupe pour peser, et les réseaux permettent ça. »

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