Débattre signifiait à l’origine « battre fortement » : on débattait le lait pour en extraire le beurre. Le verbe s’est un peu adouci en prenant le sens figuré de « discuter vivement », tandis que le substantif se polissait en étant accolé à une autre activité : conférence-débat, dîner-débat… Ce qui n’empêche pas le ton de monter entre la poire et le fromage, et l’affaire de déraper. La discussion se transforme alors en controverse, la controverse en polémique, et la polémique en altercation. On n’échange plus des arguments, mais des noms d’oiseau. Car le débat se prête à toutes les combinaisons : on peut le déplacer, l’élargir, l’élever, le rabaisser, le faire avancer ou reculer, le nourrir, le confisquer, le paralyser, voire le trancher sans prendre de gants.

Débattre, c’est parfois rabattre le caquet à un insupportable donneur de leçons. Mais débat n’est pas combat, même si cet exercice ne répond à aucune règle, contrairement aux duels d’antan. Chacun doit s’inventer un code de conduite et apprendre à battre sa coulpe s’il s’est trompé.

Trois ou quatre choses sont à proscrire : abattre trop tôt ses cartes ; battre en retraite à la première difficulté ; rebattre les oreilles de l’assistance en répétant inlassablement les mêmes formules ; battre froid à son interlocuteur ; ou n’écouter même pas ses arguments, ce qui s’appelle poliment s’en battre les fesses.

Une vieille expression est sortie des dictionnaires. Elle mériterait d’y être réintroduite au vu des mille débats stupides ou inutiles qui, du soir au matin, agitent la Toile : « battre la langue » signifiait jadis parler pour ne rien dire. 

 

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