NOS libertés sont-elles menacées par un pouvoir qui abuserait de son pouvoir ? Ce n’est pas seulement une question d’actualité : elle se pose en permanence, quel que soit le gouvernement en place. « Tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser », constatait Montesquieu. D’où la nécessité de diviser cette chose redoutable : ce fut la séparation de l’exécutif, du législatif et du judiciaire, qui est heureusement appliquée en France, malgré mille imperfections, et permet par exemple d’inculper un ancien président de la République pour corruption.

Peu de pays peuvent se prévaloir d’être réellement des États de droit. Cela n’empêche pas les abus de pouvoir, à savoir les actes d’un dirigeant politique ou d’un fonctionnaire qui dépasse les limites légales de sa charge ou en fait un usage déloyal.

Le verbe abuser a cependant un double sens : il signifie tantôt exagérer (« Y a de l’abus ! »), tantôt tromper. Le Code pénal contribue à nous embrouiller, avec des délits aux intitulés étranges (abus de confiance, abus de faiblesse…) ou qui nous entraînent encore ailleurs. L’abus de biens sociaux, par exemple, n’est pas seulement un excès ou un mensonge, mais l’usage des biens d’une entreprise à des fins personnelles.

Et pourquoi dit-on qu’un enfant a été abusé par un prédateur sexuel ? Celui-ci aurait-il exagéré ? Dépassé la mesure ? Fait un usage immodéré du corps d’une malheureuse petite victime ? Au lieu d’utiliser une telle formule, ne faudrait-il pas dire que l’enfant a été violé ?

En bon français, employer un mot abusivement, c’est s’en servir dans un sens qu’il n’a pas. Si je ne m’abuse, on abuse du verbe « abuser ». 

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