Le docteur Robert Ledgard, chirurgien esthétique renommé, travaille discrètement à la mise au point d’une peau transgénique qui aurait pu sauver son épouse, grièvement brûlée douze ans plus tôt. Mais il apparaît très vite que ce bienfaiteur de l’humanité est un fou dangereux qui tient prisonnière une jeune cobaye…

La Piel que habito (« la peau que j’habite ») de Pedro Almodovar, sorti en 2011, est une adaptation très libre de Mygale, un roman de Thierry Jonquet. Le réalisateur espagnol s’est surtout inspiré d’un film de Georges Franju, Les Yeux sans visage (1960), dans lequel Pierre Brasseur incarnait un autre apprenti sorcier qui prélevait la peau de jeunes captives pour la greffer sur sa fille. Mais Almodovar a surtout fait de l’Almodovar, réunissant dans La Piel que habito tous les thèmes qui l’obsèdent : le désir, l’amour, la mort, la différenciation sexuelle et le changement d’identité.

C’est un film d’une précision chirurgicale, découpé au scalpel. À Antonio Banderas, l’un de ses acteurs fétiches, Almodovar a confié un rôle glacial. Le cinéaste qui sait si bien mélanger les genres, glisser de la farce au drame, ferme ici la porte à toute émotion, sauf dans la scène finale. Le spectateur n’est pas invité à entrer, si l’on peut dire, dans la peau des personnages. Le justaucorps couleur chair, bardé de coutures, qui sert d’épiderme à la victime apparaît comme une enveloppe sans âme. On est loin de la vraie peau : celle qui protège, pâlit ou frémit, celle qui reçoit et transmet, celle qui attire, séduit et se livre… Ce film dérangeant aurait pu s’appeler La Piel que no habito

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