Lieux de passage
Temps de lecture : 12 minutes
Chevilly-Larue
« J’arrivai chez lui le dimanche suivant, en début d’après-midi. Il habitait un pavillon à Chevilly-Larue, au milieu d’une zone en pleine phase de “destruction créatrice”, comme aurait dit Schumpeter : des terrains vagues boueux, à perte de vue, hérissés de grues et de palissades ; quelques carcasses d’immeubles, à des stades d’achèvement variés. Son pavillon de meulière, qui devait dater des années 1930, était le seul survivant de cette époque. »
La Possibilité d’une île, 2005
Beauvais
« – Écoute, il faut qu’on se voie pour en parler. Tu peux passer à la galerie maintenant ?
– Non, là, je suis à Beauvais.
– À Beauvais ? Mais qu’est-ce que tu fous à Beauvais ?
– Je prends un peu de recul. C’est bien, de prendre du recul à Beauvais. »
La Carte et le Territoire, 2010
Rouen
« Un peu absurdement, j’ai décidé de rester à Rouen ce week-end. […] Je n’ai pas vraiment envie de visiter la ville. Pourtant il y a de très beaux vestiges moyenâgeux, des maisons anciennes d’un charme réel. Il y a cinq ou six siècles, Rouen a dû être une des plus belles villes de France ; mais maintenant tout est foutu. Tout est sale, crasseux, mal entretenu, gâché par la présence permanente des voitures, le bruit, la pollution. »
Extension du domaine de la lutte, 1994
Calais
« Calais est une ville impressionnante. D’habitude, dans une ville de province de cette taille, il y a un centre historique, des rues piétonnes animées le samedi après-midi, etc. À Calais, rien de semblable. La ville a été rasée à 95 % lors de la Seconde Guerre mondiale ; et dans les rues, le samedi après-midi, il n’y a personne. On longe des immeubles abandonnés, d’immenses parkings déserts (c’est certainement la ville de France où il est le plus facile de se garer). Le samedi soir est un peu plus gai, mais d’une gaieté particulière : presque tout le monde est saoul. Au milieu des troquets il y a un casino, avec des rangées de machines à sous où les Calaisiens viennent claquer leur RMI. Le lieu de promenade du dimanche après-midi est l’entrée du tunnel sous la Manche. Derrière les grilles, le plus souvent en famille, poussant parfois un landau, les gens regardent passer l’Eurostar. Ils font un signe de main au conducteur, qui klaxonne en réponse avant de s’engouffrer sous la mer. »
Interventions, 1998
Le Raincy
« Il y a un côté “tour de France” dans son œuvre »
Agathe Novak-Lechevalier
Quel lien faites-vous entre votre formation de dix-neuviémiste et l’œuvre de Michel Houellebecq ?
Houellebecq est un extraordinaire lecteur de tout le XIXe siècle, qui constitue le fond de sa culture. Ce…
[Point-virgule]
Robert Solé
Depuis les années 1960, le point-virgule est en déclin. Beaucoup d’écrivains le jugent inutile. On le trouve surtout dans la messagerie électronique, sous forme d’émoticône, pour exprimer un clin d’œil : ;-…
Le rire de Houellebecq
Alain Vaillant
Je ne me rappelle pas avoir vu Houellebecq rire, pendant l’une de ses innombrables apparitions médiatiques. Du moins, pas d’un rire franc et massif ; au mieux, il esquisse, comme s’il ne parvenait pas à le retenir, un sourire faussement naïf et…