C’était le 6 juillet 1997. Ma femme et moi venions de quitter Liège et roulions en direction de Cerisy-la-Salle, en Normandie, pour assister à un colloque dédié à Joris-Karl Huysmans. Nous nous relayions au volant. Pour les moments où je ne conduisais pas, j’avais prévu de lire le premier roman d’un nommé Houellebecq, Extension du domaine de la lutte, publié par Maurice Nadeau en 1994 et d’emblée controversé. J’en avais reporté la découverte à mon présent voyage, avec l’intuition que l’œuvre en cause n’était pas sans accointance avec le En ménage de Huysmans dont j’allais parler devant mes pairs. Le titre m’attirait, avec son parfum martial et marxisant, prometteur de résistance en cette fin de siècle. Va donc pour la lutte et pour son extension.

Et puis pas du tout. Dès les premières pages, je me trouvais devant un récit on ne peut plus déprimant, porté par un héros-narrateur – appelons-le Michel – qui, « cadre moyen », œuvrait vaille que vaille dans un service d’informatique du ministère de l’Agriculture. Sa déréliction était si grande que, dans son ministère ou ailleurs, il évitait de se lier avec quiconque ; il n’avait pas d’amis et n’en voulait pas ; il n’avait plus de femme et n’en voulait pas davantage. Seuls l’attiraient des gens médiocres et plongés eux-mêmes dans l’échec, gen

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