En quoi la liberté d’expression dans le domaine de la culture est-elle aujourd’hui attaquée ?

On vit dans un monde très paradoxal. On assiste d’un côté, sur les réseaux sociaux, à une sorte de libération de la parole sans limites, pas même celle de la loi contre l’incitation à la haine. De l’autre, dans le domaine de la culture, on se trouve de plus en plus face à des contestations délirantes au nom d’une vision déformée et identitaire de l’antiracisme. Je pense à la représentation d’une pièce d’Eschyle, Les Suppliantes – une œuvre sur les Danaïdes et sur l’accueil des réfugiés dans laquelle les comédiens portent des masques aux traits évocateurs –, qui a été bloquée l’année dernière par des groupes protestant contre le fait que des acteurs Blancs portent un masque noir au motif qu’il s’agirait d’un blackface. La direction de la Sorbonne a choisi de reprogrammer la représentation, mais cette affaire a pris une ampleur particulière, le réseau des protestataires s’étant élargi au-delà du groupe ultraminoritaire et caricatural de la Brigade anti-négrophobie, à des associations comme le CRAN et à des syndicats comme l’UNEF.

Aujourd’hui, de plus en plus de syndicats étudiants endossent cette vision de l’antiracisme identitaire. Je pense notamment aux SciencesCurls, une association d’étudiantes de Sciences Po qui veulent interdire à toute chanteuse ou mannequin blanche de porter des coupes afro. Cette vision identitaire de la culture travaille désormais beaucoup les jeunes militants LGBT, féministes ou antiracistes. Il ne s’agit pas de retourner à une époque où l’on pouvait dire n’importe quoi sur les minorités, se lâcher sans réfléchir à son vocabulaire, mais comme l’a très bien dit Irshad Manji, professeure de théologie m

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