De prime abord l’idée est excellente. Réduire ses frais de route par le covoiturage, échanger un après-midi à la perceuse contre une leçon de piano – à chacun sa musique… –, louer son logement vide pour se payer un week-end au soleil : voilà les beaux acquis de cette économie qu’on appelle collaborative. Une philosophie partageuse où chacun, selon la formule consacrée, se retrouve gagnant-gagnant. Je pensais à ces bienfaits modernes l’autre jour en pédalant le long de la Seine quand je stoppai net devant un étal du marché de Conflans-Sainte-Honorine. De charmantes petites barques ventrues en bois lourd et poli, joliment peintes, étaient proposées pour rien. Enfin presque rien. Quelques euros et ces modèles réduits étaient à vous, dignes de vous sacrer capitaine au long cours dans les bassins pour enfants. J’eus beau chercher au fond des nombreuses poches de mon maillot de cycliste, je n’avais pas un sou vaillant. Le marchand me considéra un instant et me tendit deux de ses joujoux. « Désolé, je n’ai pas d’argent », lui dis-je désolé. « Quand reviendrez-vous ? » Le gars me fit signe qu’il était de passage. « Je vous les donne », fit-il d’un ton qui n’appelait ni réplique ni paiement. Il m’avait fait un don sans rien attendre en retour que sans doute un merci et un sourire que je lui offris de bon cœur. Reprenant ma route, j’ai pensé qu’en voulant tout échanger, on en oublierait qu’on peut donner un coup de main pour le geste. Gratuitement.  

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