Dans une rue désertée, un collage subsiste, à moitié décollé : « notre colère sur vos murs ».

La colère, aujourd’hui, se heurte à nos quatre murs, à un quotidien où on a le droit d’aller faire ses courses mais plus celui d’enterrer ses morts. On n’a plus pied. Tout, autour de nous, est immense : la misère, le danger, nos questions.

Chaque jour, on passe par tous les âges. On a la concentration d’un enfant de quatre ans, les larmes nous montent aux yeux telle une ado, on remplit son caddie avec l’égoïsme d’un trader quadragénaire. Nos humeurs sont un océan. Elles creusent, déferlent. Des courants contraires nous traversent : à 20 heures pile, on applaudit sans savoir si on célèbre l’exploitation des soignants, si on s’étourdit d’une joie fugace ou si on est là parce qu’on a besoin d’échanger quelques mots avec sa voisine. À 20 h 05, on pense au lendemain, le futur est une vague scélérate. Sur notre écran, avant de s’endormir, on caresse de l’index des biches folâtrant sur une plage, des canards devant la Comédie-Française. Les animaux sont cathartiques, ils sont bons princes, et nous, les roitelets nus d’un monde en suspens.

Allô ? Dans

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