Chaque été, dans les Pouilles, à la fin du mois d’août, c’est le même ballet : les camions se chargent de cagettes de tomates récoltées dans la plaine de Foggia et roulent vers Naples en une longue file ininterrompue de véhicules. Cet été, la tragédie est venue rappeler à l’Italie ce qu’elle savait déjà mais qu’elle s’était empressée d’oublier : les tomates ont parfois le goût du sang. Les 4 et 6 août 2018, coup sur coup, deux accidents terribles ont coûté la vie à seize travailleurs agricoles, tous étrangers. L’Italie a alors découvert qu’il existait des ombres en Europe, des travailleurs invisibles dont on ne connaît l’existence qu’en apprenant leur mort. À la suite de ces accidents, les langues se sont déliées pour décrire ce qu’on ose à peine appeler des « conditions de travail ». Les hommes – Africains ou ressortissants des pays de l’Est pour la plupart – travaillent entre huit et dix heures par jour, sous un soleil de plomb, pour un salaire journalier moyen d’environ trente euros, duquel i

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