C’est un jour comme celui-ci, un peu plus tard, un peu plus tôt, que tu découvres sans surprise que quelque chose ne va pas, que, pour parler sans précautions, tu ne sais pas vivre, que tu ne sauras jamais. […]

Tu es un oisif, un somnambule, une huître. Les définitions varient selon les heures, selon les jours, mais le sens reste à peu près clair : tu te sens peu fait pour vivre, pour agir, pour façonner ; tu ne veux que durer, tu ne veux que l’attente et l’oubli.

La vie moderne apprécie généralement peu de telles dispositions : autour de toi tu as vu, de tout temps, privilégier l’action, les grands projets, l’enthousiasme : homme tendu en avant, homme les yeux fixés sur l’horizon, homme regardant droit devant lui. Regard limpide, menton volontaire, démarche assurée, ventre rentré. La ténacité, l’initiative, le coup d’éclat, le triomphe tracent le chemin trop limpide d’une vie trop modèle, dessinent les sacro-saintes images de la lutte pour la vie. Les pieux mensonges qui bercent les rêves de tous ceux qui piétinent et s’embourbent, les illusions perdues des milliers de laissés-pour-compte, ceux qui sont arrivés trop tard, ceux qui ont posé leur valise sur le trottoir

Vous avez aimé ? Partagez-le !